Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/355

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suffisant motif pour renouveler une entreprise aussi profitable. La bonne paie et les excellents quartiers de l’Angleterre avaient fait une forte impression sur le souvenir de ces aventuriers militaires, et la perspective de lever huit cent cinquante livres par jour faisait place à tous les arguments, soit politiques, soit moraux. Une autre cause enflammait en grande partie les esprits de la nation, non moins que la perspective attrayante des richesses de l’Angleterre animait les soldats. On avait tant écrit et tant parlé des deux côtés sur la forme du gouvernement de l’Église, que ce sujet était devenu aux yeux du peuple d’une plus grande importance que les doctrines religieuses que les deux églises avaient embrassées. Les prélatistes et les presbytériens[1] les plus fanatiques devinrent aussi intolérants que les papistes ; ils accordaient à peine la possibilité du salut hors la communication de leurs églises respectives. On faisait en vain remarquer à ces fanatiques que si le fondateur de notre sainte religion eût considéré une forme particulière d’Église comme nécessaire au salut, elle aurait été révélée avec la même précision que l’ancienne loi l’avait été dans le vieux Testament. Les deux partis continuèrent néanmoins à être aussi acharnés que s’ils avaient reçu du ciel des préceptes capables de justifier leur intolérance. Laud, dans les jours de sa domination, avait mis le feu aux poudres[2], en s’efforçant d’imposer au peuple écossais des cérémonies religieuses étrangères à ses habitudes et à ses opinions. Le succès avec lequel on l’avait combattu, les formes presbytériennes qui les avaient remplacées, les avaient rendues chères à la nation comme la cause dans laquelle elle avait triomphé. La ligue solennelle et le covenant adopté avec tant de zèle par la plus grande partie du royaume, et imposé à la pointe de l’épée à l’autre partie, avaient principalement pour but d’établir la doctrine et la discipline de l’Église presbytérienne, et de détruire l’erreur et l’hérésie. Étant parvenus à établir dans leur pays ce candélabre d’or[3], les Écossais, dans leur libéralité fraternelle, voulurent en faire de même en Angleterre. Ils pensèrent qu’ils y parviendraient facilement en prêtant au parlement anglais le secours efficace de leurs troupes. Les presbytériens, qui formaient dans le parlement anglais un parti nombreux et redoutable, s’étaient mis à la tête de l’opposition élevée contre le roi,

  1. Les prélatistes sont les Anglais ; les presbytériens, les Écossais. a. m.
  2. Had fired the train, dit le texte. a. m.
  3. Dans le langage presbytérien, cette expression signifie la véritable Église. a. m.