Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/369

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Menteith, et je serai peut-être à même de leur en opposer d’autres qui seront plus puissantes. — Milord, je suis docile à de bonnes raisons, pourvu qu’elles s’adressent à mon honneur et à mon intérêt. Eh bien donc, milord, voici, je suppose, une espèce d’armée des Highlands assemblée, ou qu’on va rassembler dans ces montagnes sauvages pour servir le roi. Or, vous connaissez le caractère des Highlanders : je ne nierai pas que ce ne soit un peuple fort de corps et vaillant du cœur, et assez courageux dans sa farouche manière de combattre, qui est aussi éloignée des usages et de la discipline de la guerre que l’était autrefois celle des anciens Scythes, ou que l’est maintenant celle des sauvages Indiens de l’Amérique. Ils n’ont pas même un fifre allemand ou un tambour, pour battre une marche, la générale, la charge, la retraite, la diane, le rappel, ou toute autre batterie ; et leurs diables de cornemuses criardes, qu’eux seuls prétendent comprendre, sont tout-à-fait inintelligibles pour les oreilles de tout cavalier accoutumé à faire la guerre chez les nations civilisées. Ainsi, si j’entreprenais de discipliner ces hordes sans culottes, il me serait impossible de me faire entendre. Et si j’étais compris, je vous en fais juge, milord, quelle chance aurais-je de me faire obéir par une bande d’hommes à moitié sauvages, qui sont habitués à payer aveuglément[1] à leurs lairds et à leurs chefs ce respect et cette obéissance qu’ils devraient payer à des officiers commissionnés. Si je leur enseignais à se mettre en bataille par l’extraction de la racine carrée, c’est-à-dire à former leur bataillon carré d’un nombre d’hommes égal à la racine carrée de leur nombre total, que pourrais-je attendre en retour pour leur avoir communiqué ces divins trésors de la tactique militaire, si ce n’est de recevoir un coup de dirk[2] dans le ventre, pour avoir placé quelque Mac Alister More, quelque Mac Shemei ou Mac Caperfae[3], sur le flanc ou à l’arrière, lorsqu’il demandait à être sur le front ? En vérité, l’Écriture sainte a bien raison lorsqu’elle dit : « Si vous jetez des perles devant des pourceaux, ils se retourneront contre vous et vous déchireront. — Je pense, Anderson, » dit lord Menteith en se retournant pour regarder un de ses domestiques, qui marchaient tous deux derrière lui, » que vous pouvez assurer à ce gentilhomme que si nous avons besoin d’of-

  1. Il y a dans le texte allemarly, mot forgé du mot espagnol llenar, qui veut dire pleinement. a. m.
  2. Poignard de montagnards écossais. a. m.
  3. Noms écossais pris au hasard et qui n’ont rapport à aucun fait historique. a. m.