Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/438

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attiré au parti presbytérien le sobriquet de têtes rondes, de chiens aux oreilles droites, et d’autres dont, dans leur insolente libéralité, les Cavaliers avaient gratifié leurs ennemis politiques.

Sir Duncan présenta son hôte à son épouse, qui répondit à son salut militaire par une révérence froide et silencieuse, dans laquelle on pouvait juger difficilement s’il y entrait plus d’orgueil que de tristesse. Le ministre, auquel il fut ensuite présenté, le regarda avec des yeux où se mêlaient l’aversion et la curiosité. Mais le major, accoutumé à soutenir de plus mauvais regards lancés par des personnes plus dangereuses, s’embarrassa peu de ceux de la dame et du ministre, et il porta ses regards sur une énorme pièce de bœuf qui fumait à l’extrémité de la table. Mais cette attaque, comme il l’aurait appelée, fut différée jusqu’à la fin des longues actions de grâces à chaque intervalle desquelles Dalgetty saisissait son couteau et sa fourchette comme s’il eût pris sa pique et son mousquet ; mais il les déposait involontairement à chaque nouveau verset du prolixe chapelain. Sir Duncan écouta avec décence, quoiqu’il passât pour s’être joint aux covenantaires plutôt par attachement pour son chef que par un zèle réel pour cette cause tout à la fois politique et religieuse. Son épouse seule écouta le bénédicité avec les signes d’une profonde dévotion.

Le repas se passa presque dans un silence de chartreux ; car ce n’était pas l’usage du major de parler lorsqu’il pouvait s’occuper d’une manière plus profitable. Sir Duncan était tout-à-fait silencieux ; son épouse et le ministre seuls échangèrent de temps en temps quelques mots, mais d’une voix à peine distincte.

Lorsque les mets eurent été enlevés et remplacés par des liqueurs de différentes sortes, le major, qui n’avait plus de raisons aussi puissantes pour garder le silence, commença à se lasser de celui de la compagnie. Il renouvela une attaque contre son hôte sur la question déjà débattue.

« Quant à ce monticule rond, colline ou éminence, appelé Drumsnab, je serais curieux de causer avec vous, sir Duncan, sur la nature du fort à y élever, afin de décider si les angles doivent être aigus ou obtus. J’ai entendu le feldmaréchal Bannier avoir une dissertation savante avec le général Tiefenbach sur un pareil sujet, pendant une suspension d’armes. — Major Dalgetty, répondit sir Duncan très-sèchement, nous autres Highlanders, nous n’avons pas l’habitude de débattre des questions militaires avec des étrangers. Ce château est en état de résister aux attaques