Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/89

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son maître et d’un ton suppliant ; « si vous n’avez pas d’égard à votre honneur, ayez égard au mien ; nous aurons assez de peine à donner une tournure décente à cette soirée, malgré tous les mensonges que je pourrai faire. — Allons, allons, ne vous inquiétez pas, lui dit son maître ; conduisez les chevaux à l’écurie ; il y a du foin et de l’avoine, j’espère. — Oh ! oui, beaucoup de foin et d’avoine » dit-il hardiment et à haute voix. Puis, d’un ton plus bas : « Il y avait quelques demi-mesures d’avoine et quelques bottes de foin qui étaient restées après l’enterrement. — C’est bien, » dit Ravenswood en prenant la lampe des mains de son domestique qui voulait la retenir, « je vais conduire moi-même l’étranger dans les appartements d’en haut. — Cela ne se peut pas, milord, dit Caleb ; si vous vouliez avoir seulement cinq minutes, dix minutes, ou tout au plus un quart d’heure de patience, et examiner le superbe paysage éclairé par la lune que présentent les campagnes du bas et du nord Berwick, pendant que j’arrangerai les chevaux, je vous précéderais dans les appartements comme il convient que vous le soyez, vous, milord, et votre honorable ami. J’ai enfermé sous clef les chandeliers d’argent, et cette lampe n’est pas convenable pour… — Nous nous en servirons fort bien, en attendant, dit Ravenswood, et vous n’éprouverez aucun inconvénient par le défaut de lumière, car si je ne me trompe, il y manque la moitié du toit. — C’est vrai, milord, » répliqua le fidèle serviteur, qui ajouta incontinent avec beaucoup de présence d’esprit : « Ces paresseux d’ouvriers ne sont pas encore venus pour le réparer, milord. — Si je me sentais disposé à plaisanter sur les calamités de ma maison, » dit Ravenswood en montant l’escalier avec Bucklaw, « le pauvre vieux Caleb m’en fournirait une ample matière. Sa passion est de représenter les objets qui composent notre misérable ménage, non tels qu’il sont, mais tels que, dans son opinion, ils devraient être ; et, à dire vrai, je me suis souvent amusé des expéditions du pauvre homme pour suppléer à tout ce qu’il croyait indispensable à l’honneur de ma famille, et des ingénieuses raisons qu’il alléguait pour excuser le manque d’objets que toute son adresse ne pouvait remplacer. Mais, quoique la tour ne soit pas des plus grandes, j’aurai quelque peine de trouver, sans son secours, l’appartement où il a fait allumer son feu. »

En parlant ainsi, il ouvrit la porte de la salle. « Ici, du moins, dit-il, il n’y a ni foyer, ni de quoi se loger. »