Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/95

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du ressentiment d’un roi ? » Telles furent les paroles dont il le salua en entrant dans sa chambre.

« Ma foi, » répondit Bucklaw qui venait de s’éveiller, « il me conviendrait peu de me plaindre d’un appartement dans lequel un si grand personnage a logé avant moi ; seulement le matelas était extrêmement dur, la voûte un peu humide, et les rats plus mutins que je ne m’y serais attendu, d’après l’état du garde-manger de Caleb ; et s’il y avait des volets à cette fenêtre grillée et un rideau au lit, il me semble que, tout bien considéré, la chambre serait un peu plus habitable. — Il est vrai qu’elle est assez nue, » dit le maître en jetant ses regards sur la petite voûte ; « mais si vous voulez vous lever et me suivre, Caleb tâchera de vous procurer un déjeuner meilleur que votre souper d’hier soir. — Oh ! je vous en prie, qu’il ne soit pas meilleur, » dit Bucklaw, en se levant et essayant de s’habiller aussi bien que l’obscurité du lieu le permettait, « qu’il ne soit pas meilleur, vous dis-je, si vous voulez que je persiste dans mes projets de réforme. Le seul souvenir du breuvage de Caleb a été plus efficace pour me corriger de l’habitude de commencer la journée en buvant le coup du matin, que ne l’auraient été vingt sermons. Et vous, maître, vous êtes-vous mis en état de combattre vaillamment le serpent logé dans votre sein ? vous voyez que je suis en train d’étouffer mes vipères l’une après l’autre. — J’ai du moins commencé la bataille, Bucklaw, répondit Ravenswood, et j’ai eu la vision charmante d’un ange qui descendait pour venir à mon secours. — Ah ! malheureux que je suis ! dit son hôte, je n’ai aucune vision à attendre, à moins que ma tante, lady Girnington, ne s’enferme dans la tombe, et alors ce serait la substance de son héritage, plutôt que l’apparition de son fantôme, que je regarderais comme le soutien de mes résolutions. Mais ce déjeuner, maître ? Est-ce que le daim qui doit servir à faire le pâté court encore dans les bois, comme dit la ballade ? — Je vais m’en informer, » répondit Ravenswood, et quittant l’appartement, il alla à la recherche de Caleb, et ce ne fut pas sans quelque difficulté qu’il le trouva dans une espèce de donjon obscur, qui avait été autrefois la sommellerie du château. Le vieillard s’occupait, de l’air le plus affairé, de la tâche fort douteuse de frotter un pot d’étain jusqu’à lui faire prendre le brillant et l’apparence d’une pièce d’argenterie. « Je crois que cela peut aller… Je crois qu’il pourra passer, pourvu qu’on ne le porte pas trop près de la fenêtre. » C’était ce qu’il se disait de temps