Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/16

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chevaux et limitaient le déploiement de l’habileté des cavaliers à la rencontre mutuelle et sans danger de leurs lances, le langage des amants à leurs dames était encore dans les termes exaltés qu’Amadis aurait employés en s’adressant à Oriana, avant de rencontrer un dragon pour la sauver. Ce ton de galanterie romanesque trouva un auteur habile mais recherché pour le réduire à des formes et à une espèce de constitution et exposer d’une manière courtoise la conversation, dans un livre pédantesque appelé Euphucs et son Angleterre.

L’extravagance de l’euphuisme ou du jargon symbolique de la même espèce domine dans les romans de la Calprenède et de Scuderi que lisait pour son amusement le beau sexe de France sous le long règne de Louis XIV, et qui étaient supposés contenir le seul et légitime langage de l’amour et de la galanterie. Sous ce règne la satire de Molière et de Boileau les flagella. Une maladie analogue, s’introduisant dans la société privée, servit de base aux dialogues affectés des précieuses, comme l’étaient les femmes qui composaient la coterie de l’hôtel de Rambouillet, et qui fournirent à Molière le sujet de son admirable comédie des Précieuses ridicules. En Angleterre, l’affectation ne paraît pas avoir survécu à l’avènement de Jacques Ier.

L’auteur eut la vanité de penser qu’un caractère dont les particularités rouleraient sur les extravagances qui étaient jadis universellement de mode, pourrait être supporté dans une histoire fictive, avec une chance d’offrir quelque amusement à la génération existante, laquelle, désireuse comme elle est de regarder en arrière sur les actions et les costumes de nos ancêtres, pourrait être également convaincue de leurs absurdités. L’auteur doit bien reconnaître qu’il fut désappointé, et que l’euphuiste, loin d’être considéré comme un caractère bien tracé de l’époque, fut condamné comme non naturel et absurde.

Il serait aisé d’attribuer cet insuccès à l’inhabileté de l’auteur, et c’est probablement ce que beaucoup de lecteurs auront fait. Il a pu également supposer que son sujet avait été mal choisi.

Les coutumes d’un peuple grossier sont toujours fondées sur la nature, c’est pourquoi les sentiments de la génération plus polie sympathisent immédiatement avec elle. Il n’est pas besoin de notes nombreuses et de dissertations savantes pour mettre le plus ignorant à même de reconnaître les sentiments et la diction des caractères d’Homère ; nous n’avons, comme dit Lear, qu’à