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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/265

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sa sœur adoptive le conjurer de ne point aller chercher sa ruine, et de ne leur point enlever leur futur espoir de protection et de bonheur.

Le cœur d’Halbert s’irrita à ce reproche, et il répondit : « Hé bien ! que demandez-vous ? Il vous reste celui qui est meilleur que moi, plus sage, plus discret, plus brave que tout ce qui existe ; vous possédez un protecteur et n’avez plus besoin de moi. »

Il se détourna une seconde fois pour la quitter ; mais Marie Avenel posa une main sur son bras par un geste si affectueux, qu’à peine l’eut-elle touché qu’il lui fut impossible de continuer. Il s’arrêta un pied avancé pour sortir de la cour, mais si peu résolu à partir qu’il avait l’air d’un voyageur que retiennent les charmes d’un magicien, et qui ne peut quitter l’attitude que lui donnait sa marche, ni poursuivre sa route.

Marie Avenel mit à profit son état d’indécision et dit : « Écoutez-moi, Halbert, écoutez-moi ; je suis orpheline, et le ciel même écoute les orphelins : dès votre enfance j’ai été votre compagne, et si pendant un instant vous refusiez de m’entendre, à qui Marie Avenel pourrait-elle demander une faveur ?

— Je vous écoute, dit Halbert Glendinning, mais parlez en peu de mots ; ma chère Marie, vous vous trompez sur la nature de l’objet qui m’appelle : c’est seulement une partie de chasse que nous nous proposons de faire ce matin.

— Ne dites pas cela ! » s’écria la jeune fille en l’interrompant, « ne me dites pas cela ! vos discours peuvent en tromper d’autres, mais moi, jamais. Dès mes plus jeunes années, j’ai eu un certain sens que l’imposture ne peut tromper. Pourquoi le sort m’a-t-il douée d’un tel pouvoir, je ne le sais ; mais, élevée dans cette vallée solitaire et vouée à l’ignorance, mes yeux cependant peuvent voir trop souvent ce que les hommes voudraient cacher. Je puis découvrir le dessein le plus funeste lors même qu’un sourire vient lui servir de voile, et un regard m’en apprend plus que les protestations et les serments n’en disent aux autres.

— Eh bien donc, dit Halbert, si tu peux lire dans le cœur humain, dis-moi, chère Marie, ce que tu aperçois dans le mien. Dis-moi ce que tu vois, ce que tu lis dans mon cœur, ne t’offense-t-il pas ? Dis seulement cela, et tu guideras ma conduite ; et maintenant et toujours tu seras le seul arbitre de mon honneur ou de ma honte ? »

Tandis que Halbert Glendinning parlait, le visage de Marie