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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/275

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heure : quoi qu’il en soit, j’essaierai le charme, et s’il peut m’envoyer du secours, il le fera ou apprendra à quelle extrémité peut se porter un homme désespéré, même envers ceux de l’autre monde. »

Il ôta de son pied son soulier couvert de sang, et répéta la formule d’évocation que le lecteur connaît déjà ; mais il n’obtint aucune réponse, et ne vit aucune apparition. Le jeune homme, avec l’impatience que lui donnait son désespoir et la hardiesse téméraire qui était la base de son caractère, s’écria : « Fée, sorcière, démon, es-tu sourd lorsque je demande du secours, et prêt seulement lorsqu’il s’agit de vengeance ? Parais et réponds-moi, ou je comblerai la fontaine, j’arracherai ton buisson de houx, et laisserai ce lieu aussi désert et aussi dépouillé que je le suis de consolation et d’assistance. » Cette invocation pleine de fureur et de délire fut soudain interrompue par un son éloigné, ressemblant à un cri sortant de la gorge du ravin. « Grâces soient rendues à sainte Marie ! » dit le jeune homme se hâtant de remettre sa bottine, « j’entends la voix de quelque homme, qui pourra m’aider de ses conseils, et me prêter son secours dans cette affreuse extrémité. »

Halbert Glendinning, ayant remis sa bottine, poussa des cris par intervalle pour répondre à ceux qu’il avait entendus, et courut avec la vitesse d’un daim poursuivi, dans les sentiers pierreux, comme si le paradis eût été devant lui, l’enfer et les furies derrière, et comme si son éternelle misère ou son éternelle félicité eût dépendu de sa promptitude. Dans un espace de temps, qui eût été extrêmement court pour tout autre que pour un montagnard écossais, ému par un intérêt profond et passionné, le jeune homme atteignit l’entrée du ravin où le ruisseau, qui sortait de Corrie-nan-Shian, se déchargeait, et s’unissait aux eaux de la petite rivière de Glendearg.

Là, il s’arrêta et regarda de côté et d’autre dans la vallée, sans apercevoir une seule forme humaine ; le cœur lui manqua. Mais les sinuosités du vallon pouvaient empêcher qu’il ne découvrît la personne dont la voix s’était fait entendre ; cependant elle ne devait pas être éloignée, quoiqu’il ne pût la voir. Les branches d’un vieux chêne qui s’élevait, appuyé contre un rocher escarpé, offrirent à son esprit hardi un moyen d’arriver à ce lieu d’observation, quoique beaucoup d’hommes eussent tressailli à l’idée d’une semblable entreprise. S’élançant de terre, l’actif jeune homme saisit la bran-