Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/309

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proie que ne l’était Christie de Clint-Hill. Il conduisit cependant Halbert Glendinning à une petite chambre qui avait vue sur le lac, et où était dressé un lit à roulettes : mais avant de le quitter, Christie eut grand soin de donner un coup d’œil sur les barreaux qui se croisaient à l’extérieur de la fenêtre, et quand il sortit il n’oublia pas de fermer la porte à double tour : circonstances qui firent penser au jeune Glendinning qu’il ne sortirait pas du château d’Avenel à sa volonté. Quoi qu’il en fût, il jugea plus prudent de ne faire aucune observation à Christie sur ces démonstrations alarmantes.

Aussitôt qu’il se trouva seul, il se recueillit, et repassa rapidement dans son esprit tous les événements de la journée : il fut fort étonné que sa destinée précaire, et même la mort de Piercy Shafton, frappassent moins son imagination que la conduite singulièrement hardie et déterminée de son compagnon Henri Warden. La Providence, qui poursuit ses desseins jusqu’à leur parfait accomplissement, avait suscité, pour la réforme en Écosse, une foule de prédicateurs qui avaient plus d’énergie et de chaleur que d’instruction ; forts seulement par leur âme, inébranlables dans leur croyance, dédaignant tout ce qui s’interposait entre eux et leur but principal, et prenant sans hésiter la route la plus difficile, lorsqu’elle était la plus courte. Le doux souffle de la brise peut balancer les branches du saule ; mais il faut l’impétuosité et les sifflements de la tempête pour remuer un peu les vastes rameaux de chêne : la méthode de ces prédicateurs devant un auditoire moins rude et dans un siècle moins grossier aurait été mal choisie ; mais elle avait un merveilleux succès chez le peuple sauvage auquel elle était adaptée.

Aussi Halbert Glendinning, qui avait repoussé les arguments du prédicateur, était néanmoins frappé de la fermeté de sa conduite dans la scène avec Julien Avenel. Il pouvait être inconvenant, et surtout imprudent, de choisir un tel endroit, et un semblable auditoire, pour faire des reproches sévères à un baron qui, par ses habitudes et sa position, était en possession d’un pouvoir indépendant. Cependant la conduite du prédicateur était pure, ferme, courageuse, basée sur les principes les plus respectables et sur la conviction la plus profonde. Glendinning, qui avait vu avec une véritable horreur la conduite d’Avenel, sentait s’augmenter l’intérêt qu’il portait déjà à l’estimable vieillard qui avait risqué sa vie pour ne point faire une concession au crime. Cette