Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/320

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nouveau pour que le chevalier, qui paraissait dans un état singulier de perplexité, l’informât des particularités relatives à Halbert Glendinning. La situation du noble anglais devenait extrêmement embarrassante, car ce qu’il avait à révéler sur l’issue du combat était si révoltant pour son orgueil, qu’il ne pouvait se résoudre à entrer dans de tels détails ; et quant au sort actuel d’Halbert, il l’ignorait entièrement.

Pendant ce temps, le père Eustache le pressait vivement, et le priait d’observer qu’il se faisait le plus grand tort en refusant de rendre un compte exact de sa journée. « Vous ne pouvez nier, lui dit-il, que vous n’ayez fait hier une violente injure à cet infortuné jeune homme, et que votre emportement ne se soit calmé tout à coup si soudainement que nous en sommes restés stupéfaits. Vous lui avez proposé hier soir une partie de chasse pour aujourd’hui, vous êtes partis ensemble au point du jour. Vous vous êtes séparés, dites-vous, à la fontaine, près du rocher, une ou deux heures environ après le lever du soleil ; et il paraît qu’avant cette séparation vous avez eu une querelle ensemble.

— Je n’ai pas dit cela, répondit le cavalier. Voilà vraiment bien du bruit pour l’absence d’un serf, qui est allé rejoindre peut-être, si toutefois il est parti, la première bande de voleurs qu’il aura rencontrée. C’est à moi, à un chevalier de la race des Piercy que vous demandez compte d’un fugitif d’une aussi chétive importance ? Eh bien ! faites-moi connaître le prix que vous mettez à sa tête, et je la paierai au trésorier de votre couvent.

— Vous avouez donc que vous avez tué mon frère ? » dit Édouard intervenant de nouveau. « Eh bien ! je vous apprendrai le prix que nous autres Écossais nous attachons à la vie de nos amis.

— Paix ! Édouard, paix ! je vous en conjure, reprit le sous-prieur, je vous l’ordonne même. Et vous, sir chevalier, ayez, s’il vous plaît, une meilleure opinion de nous, et gardez-vous de croire que vous puissiez verser le sang écossais sans avoir à le payer autrement que comme du vin répandu dans une orgie. Ce jeune homme n’est point un serf ; vous savez fort bien que, dans votre pays, vous n’oseriez lever l’épée contre le dernier des sujets de l’Angleterre, sans vous exposer à rendre compte d’une telle action devant la justice. N’espérez pas qu’il en soit autrement ici, vous tomberiez dans l’erreur.

— Vous me feriez perdre patience, s’écria l’euphuiste, de même