Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/41

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de tout entreprendre pour arracher ses restes vénérés à une terre souillée par l’hérésie et abandonnée de tous ses frères. Comme il connaissait l’endroit où avait été déposé le cœur de cet individu, il forma le projet de venir dans sa patrie, pour recouvrer cette précieuse relique. Mais la vieillesse, et puis une maladie vinrent contrarier son dessein, et ce fut à son lit de mort qu’il me chargea de l’exécuter à sa place. Les événements importants qui se sont rapidement succédé, la suppression de notre ordre, l’exil de ses membres, tout cela m’a obligé pendant plusieurs années à différer l’accomplissement du devoir qui m’avait été imposé. Pourquoi, en effet, transporter les restes d’un saint et digne homme dans un pays où la religion et la vertu étaient devenues des objets de moquerie et de mépris ? mais maintenant j’ai une patrie, qui, j’espère, sera permanente, s’il est sur la terre quelque chose que l’on puisse appeler ainsi. C’est là que je veux transporter le cœur du bon père, et à côté de la niche qu’il occupera, je creuserai mon propre tombeau.

— Certes, ce doit avoir été un excellent homme pour qu’après tant d’années on donne à sa mémoire de telles marques de considération.

— C’était en effet, comme vous le dites fort bien, un excellent homme : excellent dans sa vie et dans sa doctrine, excellent surtout par le sacrifice généreux et désintéressé qu’il fit à l’amitié et à ses principes de tout ce que la vie a de plus cher. Mais vous lirez son histoire. Je me croirai heureux de pouvoir satisfaire votre curiosité, et en même temps de vous témoigner combien je suis sensible à vos bontés, si vous voulez bien me procurer les moyens d’exécuter mon projet. »

Je répondis au bénédictin que, comme les décombres dans lesquelles il se proposait de fouiller ne faisaient point partie du cimetière ordinaire, et comme d’ailleurs j’étais fort bien avec le sacristain, je ne doutais pas que je ne pusse lui faciliter l’accomplissement de ses pieux désirs.

Là-dessus nous nous séparâmes pour la nuit, et le lendemain matin je ne manquai pas d’aller trouver le sacristain, qui, moyennant une légère rétribution, accorda volontiers la permission de fouiller, à condition toutefois qu’il serait présent à l’opération : il voulait veiller à ce que l’étranger n’emportât rien qui fût intrinsèquement de quelque valeur.

« Pour des os, des crânes, des cœurs, s’il en trouve, il sera