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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/455

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— Et moi, dit le meunier, j’ai le même grain à moudre ; car j’espère que quelqu’un d’entre ces bons pères voudra bien marier ma fille avec son joli fiancé.

— Cela est inutile, répondit Shafton, la cérémonie a été solennellement célébrée.

— Il ne serait pas mauvais de la bluter une seconde fois, reprit le meunier ; il vaut mieux être sûr, comme je le dis, lorsqu’il m’arrive de prendre une double mouture dans le même sac.

— Faites taire le meunier, dit Murray, où il fera mourir sir Piercy. Milord, l’abbé nous offre l’hospitalité dans le couvent ; je suis d’avis que nous nous y rendions tous et sir Piercy aussi. Je veux faire connaissance avec la jeune héritière d’Avenel : demain je dois lui servir de père. Toute l’Écosse verra comment Murray sait récompenser un fidèle serviteur. »

Marie Avenel et son amant évitèrent de rencontrer l’abbé, et prirent leur demeure momentanée dans une maison du village, où le lendemain leurs mains furent unies par le prédicateur protestant en présence des deux comtes. Le même jour, Piercy Shafton et son épouse partirent avec une escorte qui devait les conduire sur les côtes et les voir s’embarquer pour les Pays-Bas. Le lendemain, de grand matin, les troupes des comtes se mirent en marche pour le château d’Avenel, afin de mettre le jeune marié en possession du domaine de son épouse ; domaine qui leur fut rendu sans aucune opposition.

Mais ce ne fut pas sans le renouvellement des présages qui accompagnaient chaque grande révolution de cette famille prédestinée, que Marie reprit possession du château de ses ancêtres. Ce même guerrier qui avait apparu plus d’une fois à Glendearg fut vu par Tibb Tacket et par Martin, qui retournaient avec leur jeune maîtresse pour partager son changement de fortune. Il semblait glisser devant la cavalcade qui s’avançait sur la longue chaussée : il s’arrêtait à chaque pont-levis, et agitait sa main en signe de triomphe ; enfin il disparut sous l’obscur portique qui était surmonté des armes de la maison d’Avenel. Les deux fidèles domestiques ne firent part de leur vision qu’à dame Glendinning, qui, le cœur gonflé d’orgueil, avait accompagné son fils pour le voir prendre place parmi les barons du pays. « mon cher enfant ! » s’écria-t-elle, lorsqu’elle eut entendu leur rapport, « le château est une belle demeure, cela est sûr, mais je désire que vous ne