Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/52

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les covenantaires fugitifs. Au fait, nous nous aperçûmes qu’il n’y avait pas de roman un peu célèbre qu’il n’eût lu, et que l’homme hérissé de science n’était pas un moindre amateur des productions de votre pays natal (l’Utopie sus-mentionnée), ou, en d’autres termes, un liseur moins déterminé de romans que ne l’est à dix-huit ans toute ouvrière en modes.

Je ne vois d’autre excuse à vous offrir pour vous importuner de toutes ces choses, mon cher capitaine, que le désir de consacrer le souvenir d’une soirée délicieuse, et celui de vous encourager à vous défaire de cette modeste défiance qui vous fait craindre que l’on ne soupçonne vos rapports avec le pays enchanté de la décevante illusion. En retour de votre tirade poétique, je vais vous citer un passage d’Horace lui-même, accompagné d’une paraphrase pour votre propre usage, cher capitaine, et celui du club de votre village, toutefois et par respect, à l’exception du curé et du maître d’école.

Ne sit ancillœ tibi amor pudori, etc.

De la riante fiction
Ne dédaigne point les mensonges.
Toi qui naquis parmi les songes,
Aux bords où vit l’illusion.
Le sujet chanté par Homère
N’est qu’un rêve délicieux ;
Lui-même, chantre harmonieux,
Ne fut qu’une heureuse chimère.

Après vous avoir dit quelle est votre patrie, mon cher capitaine Clutterbuck, je prendrai la liberté de vous parler de la famille dont vous descendez immédiatement. Votre terre de prodiges n’est point aussi peu connue que vous paraissez le croire. Mais vous avez cela de commun avec vos compatriotes de mettre beaucoup de soin et d’anxiété à cacher tout ce qui concerne votre origine. Il y a effectivement cette différence entre les habitants de votre pays et ceux de notre monde plus matériel, que plusieurs des plus estimables parmi les vôtres, tels qu’un vieux montagnard appelé Ossian, un moine de Bristol nommé Howley, et quelques autres encore, éprouvent le désir de se faire passer pour habitants du pays de la réalité, tandis que ceux des nôtres qui renient leur patrie sont précisément des hommes que cette patrie serait très-disposée à ne pas reconnaître. Les détails particuliers que vous