Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/270

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des autres, mais dans la consciencieuse chaleur avec laquelle on l’exerce. Et néanmoins à une si haute perfection il se mêlait chez Catherine un air de rusticité et d’étourderie plus propre à une jeune villageoise, à la reine du cercle qui entoure l’arbre de mai, qu’à la descendante illustre d’un ancien baron. Une pointe d’audace, éloignée de l’effronterie, et ne ressemblant nullement à la grossièreté vulgaire, donnait un caractère piquant à tout ce qu’elle faisait. Marie, en la défendant quelquefois contre les reproches de sa grave compagne, la comparait à un oiseau qui, échappé de sa cage, répète gaiement sur les branches du taillis verdoyant les chansons qu’il apprit dans la captivité.

Les moments que le page pouvait passer en présence de cette créature enchanteresse s’écoulaient si rapidement pour lui, qu’ils balançaient l’ennui fatigant de tout le reste de la journée. Le temps de la conversation était cependant très-court, et jamais entretien particulier entre Catherine et lui n’était permis ; une pareille entrevue n’était pas même possible. Soit par quelque précaution spéciale pour l’honneur de la maison de la reine, soit que telles fussent ses idées générales des convenances, dame Fleming semblait surtout attentive à ce point de discipline, et elle employait dans le seul intérêt de Catherine toute la prudence et l’expérience qu’elle avait acquises lorsqu’elle portait le titre de Mère des dames d’honneur de la reine, et par lesquelles elle s’était attiré la haine bien cordiale de ses subordonnées. Elle ne put empêcher cependant des rencontres fortuites : il aurait fallu pour cela que Catherine eût été plus soigneuse à les éviter, et Roland Græme moins empressé à les rechercher. Un sourire, une raillerie, un sarcasme dépouillé de sa sévérité par le coup d’œil qui l’accompagnait, était tout ce que le temps leur permettait dans de semblables occasions. Mais ces entrevues passagères ne fournissaient pas le temps et les moyens de renouveler la discussion sur les circonstances de leurs précédentes rencontres ; elles ne permettaient pas non plus à Roland d’éclaircir la mystérieuse apparition du page au manteau de velours pourpre dans l’hôtellerie de Saint-Michel.

Les mois d’hiver avaient passé tristement et le printemps était déjà avancé, lorsque Roland Græme observa un changement graduel dans la conduite de ses compagnes de prison. N’ayant à s’occuper d’aucune affaire, et, comme ceux de son âge, de son éducation et de sa condition, suffisamment curieux de ce