Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/400

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noble. Quoiqu’il en soit, je réussis assez bien dans ces mêmes travaux, ainsi que lady Catherine Seyton le sait quelque peu, car depuis que nous sommes ici je lui ai fait une épingle d’argent.

— Oui, répliqua Catherine ; mais, ajouta-t-elle malicieusement, il faut tout dire à Sa Majesté : votre bijou était si peu solide qu’il se brisa le jour suivant et que je l’ai perdu.

« Ne la croyez pas, Roland, reprit la reine ; elle a pleuré lorsque l’épingle s’est cassée, et elle en a placé les morceaux dans son sein. Mais voyons votre projet. Pourriez-vous forger habilement de fausses clefs ?

— Non, madame, parce que je ne connais pas les serrures. Mais je suis convaincu que j’en pourrai faire un trousseau qui, au premier coup d’œil, ressemblera parfaitement à ce vilain paquet que la dame vient d’emporter tout-à-l’heure : de sorte qu’il ne s’agira que de faire ici une substitution adroite.

— Et la bonne dame, grâce au ciel, est tant soit peu aveugle, ajouta la reine. Mais comment faire pour une forge, mon ami, et pour les moyens de travailler sans être observé ?

— La forge de l’armurier du château, à laquelle j’ai travaillé quelquefois avec cet homme, est sous la voûte ronde qui forme le souterrain de la tourelle. Il a été renvoyé avec l’homme du guet, parce qu’on lui supposait beaucoup trop d’attachement pour George Douglas. On est accoutumé à me voir travailler dans ce caveau, et je trouverai quelque excuse qui me permettra de me servir du soufflet et de l’enclume.

— Le projet semble assez bon, dit la reine ; mettez-vous à l’ouvrage, mon enfant, avec la plus grande promptitude, et prenez garde que l’on ne découvre la nature de votre travail.

— Oh ! je prendrai la liberté de mettre le verrou, dans le cas où le hasard amènerait quelques visiteurs, afin d’avoir le temps de cacher mon ouvrage avant d’ouvrir la porte.

— Cela ne suffira-t-il pas pour élever des soupçons dans un lieu qui en inspire déjà naturellement ? dit Catherine.

— Point du tout, reprit Roland ; Grégoire l’armurier, comme tout bon ouvrier, s’enferme lorsqu’il fait quelque chef-d’œuvre de son art. Et après tout, il faut bien courir quelque risque.

— Il est temps de nous retirer, dit la reine ! et que Dieu vous bénisse, mes enfants. Si Marie reprend jamais le dessus, vous vous élèverez avec elle. »