Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/406

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digne pécheresse que je suis ! s’écria-t-elle ; pour moi un homme si saint et si élevé dans les ordres porte l’habit d’un vil soldat, et brave le danger de recevoir la mort réservée aux traîtres !

— Le ciel protégera ses fidèles serviteurs, dit Catherine Seyton ; l’aide du saint homme attirerait les bénédictions sur notre entreprise, si elle n’était déjà sainte et bénie par elle-même !

— Ce que j’admire dans mon père spirituel, ajouta Roland, c’est l’air calme qu’il a montré en me voyant : il n’a point fait le moindre mouvement qui ait pu faire soupçonner que nous nous connaissions dès long-temps. Je n’aurais pas pensé que ce fût possible, si ce n’est dans le temps où je croyais encore qu’Henry était la même personne que Catherine.

— Mais n’avez-vous pas remarqué avec quelle finesse le bon père a éludé les questions de lady Lochleven, dit la reine, en lui disant l’exacte vérité, qu’elle interprétait toujours de manière à se tromper elle-même ? »

Roland pensa au fond de son cœur que lorsqu’on disait la vérité dans le dessein de tromper, ce n’était guère mieux qu’un mensonge déguisé. Mais ce n’était pas l’instant de discuter un tel cas de conscience.

« Et maintenant examinons le signal du rivage, s’écria Catherine ; mon cœur me dit que nous verrons cette nuit deux lumières, au lieu d’une, briller dans ce jardin qui est notre Éden. En ce cas, Roland, vous remplirez votre rôle bravement, et nous danserons sur la pelouse comme les fées à l’heure de minuit. »

Catherine ne s’était pas trompée dans ses conjectures. Ce soir même, deux lumières au lieu d’une brillèrent dans la chaumière, et le cœur du page palpita lorsqu’il sut que le nouveau venu avait reçu l’ordre de se mettre en sentinelle dans la partie extérieure du château. Quand il apprit cette nouvelle à la reine, elle lui présenta la main : il s’agenouilla et en la portant à ses lèvres avec le respect dû à sa souveraine, il la sentit humide et froide comme le marbre. « Pour l’amour de Dieu, madame, s’écria-t-il, ne perdez pas courage !

— Appelez à votre aide la sainte Vierge, dit lady Fleming… appelez votre ange gardien.

— Appelez les esprits des cent rois dont vous êtes descendue, s’écria le page ; dans cet instant la fermeté d’un monarque vaut mieux que le secours de tous les saints.

— Oh ! Roland Græme, » dit Marie d’un air abattu, « soyez-