Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/80

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gisaient sur la terre : les fenêtres à treillages avaient été rompues et enfoncées. Enfin le petit jardin, où les travaux assidus de l’ermite entretenaient l’ordre et la fraîcheur, avait été ravagé, détruit, foulé sous les pieds des hommes et les pas des animaux.

La source sainte elle-même n’avait pas été épargnée. Elle coulait auparavant sous un dôme en arcades, que la dévotion des anciens temps avait érigé pour abriter ses eaux salutaires. Les arcades étaient presque entièrement démolies, et les pierres avaient été jetées dans le bassin comme pour obstruer, pour étouffer la source, qui, après avoir partagé les honneurs du saint, était de moitié dans sa disgrâce. Les destructeurs avaient arraché une partie du toit de l’ermitage ; ils avaient même attaqué avec la pioche et le levier l’un des angles du bâtiment et en avaient déplacé plusieurs grosses pierres : mais la solidité de la maçonnerie leur avait opposé un obstacle qu’ils n’eurent pas le temps ou la patience de vaincre.

Si l’on visite de pareilles ruines, quand plusieurs années ont passé sur elles, quand le travail incessant de la nature a fait graduellement disparaître les traces de la violence des hommes, soit sous les touffes d’herbe grimpante, végétation luxuriante des étés, soit sous les taches moussues de la saison humide ; à travers ce voile pittoresque, elles offrent une mélancolique beauté. Mais quand les récentes atteintes du marteau des démolisseurs étalent encore leur nudité hideuse, rien n’adoucit le sentiment de désolation que ces débris inspirent : et tel était le spectacle que le jeune homme contemplait avec une profonde amertume.

Dès que Roland Græme fut revenu de sa première surprise, il n’eut pas de peine à trouver la cause de ces ravages. La destruction des édifices papistes n’eut pas lieu à la fois dans toute l’Écosse, mais on reprit cette œuvre à différentes époques, et selon l’esprit qui faisait agir le clergé réformé ; quelques-uns excitaient leurs auditeurs à ces actes de vandalisme ; et d’autres, doués de plus de goût et de sentiment, cherchaient à protéger les anciens autels, tout en désirant les voir purifiés des objets qui avaient attiré une dévotion idolâtre. Aussi, de temps à autre, la populace des villes et des villages écossais, excitée soit par sa propre haine contre les superstitions papistes, soit par les doctrines fanatiques de quelques prédicateurs zélés, reprenait l’œuvre de la destruction, et l’exerçait sur une église, une chapelle ou une cellule isolée, qui avait échappé au premier transport de leur indignation contre la