Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/114

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détail par écrit à la personne, non à aucune autre, qui vous remettra cette bague en signe d’intelligence… Regardez-la : elle est de prix, et je vous en ferai volontiers cadeau.

— Non, monsieur ; je ne désire aucune récompense : mais il me semble que ce serait une démarche imprudente, à moi qui dépends du public, de me mêler d’une affaire aussi louche et aussi scabreuse… Elle ne me regarde nullement.

— Elle vous regarde, vous et tous les pères de famille. Quiconque désire voir sa fille échapper à la honte, au péché, à la misère, est plus intéressé à cette affaire qu’à aucune chose qui soit au monde.

— Fort bien, monsieur ; voilà qui s’appelle parler ; et je plains de toute mon âme le loyal et vieux gentilhomme qui a compromis sa fortune en tenant table ouverte pour l’honneur de son pays, et dont la fille, qui devrait être l’appui de sa vieillesse, est tombée entre les serres d’un milan comme ce Varney. Et quoique le rôle que vous jouez dans cette affaire soit tant soit peu extravagant, je me ferai fou pour vous tenir compagnie : par des renseignements exacts et sûrs, je vous aiderai, autant qu’il dépendra de moi, dans vos honorables efforts pour ramener entre ses bras la fille du vieux gentilhomme. Mais de même que je serai loyal avec vous, je désire que vous le soyez à mon égard, et que vous me gardiez le secret ; car ce serait une mauvaise affaire pour l’Ours-Noir, si l’on savait que son maître se mêle de choses pareilles. Varney a assez de crédit auprès des juges pour faire décrocher ma noble enseigne de l’endroit où elle fait si bel effet, me faire retirer ma licence, et me ruiner de la cave au grenier.

— Ne doutez pas de ma discrétion, mon hôte ; je vous garderai en outre une profonde reconnaissance pour le service que vous m’avez rendu, et pour le danger auquel vous vous serez exposé… Rappelez-vous que la bague est le signe d’intelligence ; et maintenant je vous dis adieu ; car votre avis est que je dois m’éloigner d’ici le plus tôt possible.

— Suivez-moi donc, mon hôte, et marchez aussi doucement que si vous posiez le pied sur des œufs… Personne ne doit savoir comment et par où vous êtes parti. »

Aussitôt que Tressilian fut prêt, Gosling, à l’aide de sa lanterne sourde, le conduisit, à travers un long dédale de passages qui aboutissaient à la cour extérieure, dans une écurie écartée, où il avait d’avance placé le cheval de son hôte ; il l’aida alors à attacher à la selle le petit porte-manteau où étaient ses effets, ouvrit une