Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/286

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une vitesse extraordinaire, jusqu’à ce qu’il se fût de beaucoup éloigné de l’église de Saint-Ninian et de la baie de sable.

En arrivant à Jarlshof, l’altération de ses traits était si grande, que Swertha crut bien qu’il allait tomber dans un de ses accès de profonde mélancolie.

« Et pouvait-on s’attendre à mieux, pensait Swertha, puisqu’il s’est obstinée visiter Norna de Fitful-Head, quand elle était dans la terrible église de Saint-Ninian ? »

Mais sans donner d’autres preuves d’aliénation mentale qu’un sombre et profond abattement, M. Mertoun l’informa qu’il avait l’intention de se rendre à la foire de Kirkwall… chose si contraire à ses habitudes, que la femme de charge refusa presque d’en croire ses propres oreilles. Bientôt après, il écouta avec insouciance les rapports que lui firent les différentes personnes envoyées à la recherche de Mordaunt, par mer et par terre, et qui toutes revenaient sans nouvelles. La tranquillité avec laquelle il apprit ce mauvais succès convainquit Swertha que Norna lui avait annoncé que les recherches seraient infructueuses.

Le village fut encore plus surpris lorsque le tacksman, M. Mertoun, comme entraîné par quelque résolution subite, fit ses préparatifs pour visiter Kirkwall durant la foire, quoiqu’il eût jusque-là évité soigneusement tous ces lieux de réunion. Swertha se mit en campagne pour pénétrer ce mystère, mais vainement, et elle prit une alarme très vive sur le sort de son jeune maître. Mais sa peine s’adoucit beaucoup lorsqu’elle reçut une somme d’argent, assez modique, mais qui sembla un trésor à la vieille femme, somme que son maître lui remit entre les mains en lui apprenant qu’il avait pris une place pour se rendre à Kirkwall dans une petite barque appartenant au propriétaire de l’île de Mousa.




CHAPITRE XXVI.

le voyage.


Elle ne pleurait plus, ses larmes étaient épuisées. Le désespoir était venu, et elle le prenait pour la joie : elle le prenait pour la joie, mais ses joues pâlissaient ; elle se flétrissait comme un lis brisé par la grêle.
Continuation du vieux Robin Gray.


La position de Minna ressemblait beaucoup à celle de l’héroïne de village dans la charmante ballade de lady Anne Lindsay. Sa fer-