Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/330

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Pacolet fit un signe affirmatif, et d’un geste l’engagea à lire la lettre :

« Ce n’est pas chose aisée à la seule lueur du feu, mon cher ami, répliqua l’udaller ; mais elle doit concerner Minna, et nous allons essayer. »

Brenda offrit de l’aider ; mais l’udaller répondit : « Non, non, ma fille ; les lettres de Norna doivent être lues par ceux à qui elles sont adressées. Donnez à Strumpfer une goutte d’eau-de-vie en attendant, quoiqu’il mérite peu d’en avoir, après la grimace qu’il m’a faite en lançant le gros flacon par delà le rocher, comme si c’eût été de l’eau de fossé. — Voulez-vous servir de Ganymède à ce digne étranger, ami Yellowley, ou lui offrirai-je moi-même à boire ? » demanda Claude Halcro à l’oreille du facteur, tandis que Magnus Troil, après avoir soigneusement essuyé des lunettes qu’il tira d’un large étui de cuivre, les ajustait sur son nez et déchiffrait l’épître de Norna.

« Je ne voudrais ni le toucher ni l’approcher, pour tout le territoire de Gowrie, » répliqua le facteur qui ne pouvait dissiper entièrement ses craintes, quoiqu’il vît le reste de la société accueillir le nain comme une créature de chair et de sang ; « mais je vous prie de lui demander ce qu’il a fait de ma corne d’argent. »

Le nain qui entendit la question rejeta sa tête en arrière et ouvrit son énorme gosier en le montrant du doigt.

« Allons, s’il les a avalées, il n’en faut plus parler, répliqua le facteur ; seulement je souhaite qu’un pareil plat lui profite comme de la luzerne mouillée à une vache. Il est un des serviteurs de dame Norna, à ce qu’il paraît… tel valet, telle maîtresse ! Mais si le vol et la sorcellerie restent impunis dans ce pays, milord peut chercher un autre facteur ; car j’ai toujours vécu dans une contrée où les richesses terrestres du pauvre monde sont à l’abri des voleurs de toute espèce, aussi bien que leurs âmes immortelles sont hors des griffes du diable et de ses compères… Dieu nous garde et nous protège ! »

L’agriculteur se gêna peut-être d’autant moins pour exhaler ses plaintes que l’udaller ne pouvait l’entendre ; car pendant cette réplique Magnus avait entraîné Claude Halcro à l’écart, dans un autre coin de la hutte.

« Or çà, l’ami Halcro, disait Magnus, avouez-moi pourquoi vous êtes allé à Sumburgh, car j’ai peine à croire que c’était pour tenir compagnie à cet animal.