Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/346

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lunette sur tous les navires qui la traversaient, dans l’espoir de distinguer le bâtiment de Magnus Troil, puis, suivant son compagnon, il descendit la montagne en silence.




CHAPITRE XXXII.

la dispute.


Je lutte comme le vaisseau qu’entraîne la marée qui, faute d’un bon vent, n’a point la force de résister à la force du courant… C’est ainsi que, jurant chaque jour de renoncer à mes vices, l’habitude, une circonstance imprévue, une nouvelle tentation, me rejettent à la mer.. Ô souffle divin, gonfle mes voiles, seconde mon faible navire qui ne peut jamais sans toi gagner le port du salut.
Il est rare de rencontrer deux pareils.


Cleveland, avec son confident Bunce, descendit quelque temps la montagne sans prononcer un mot, jusqu’à ce qu’enfin ce dernier renoua la conversation.

« La blessure de ce jeune drôle vous pèse plus qu’il ne faut sur la conscience, capitaine… J’aurais cru que vous saviez faire davantage et y penser moins. — Pas après une si légère provocation, Jack, répondit Cleveland. Cet enfant m’avait sauvé la vie ; et croyez que je lui avais rendu la pareille, sans quoi nous n’en serions jamais venus à nous battre. J’espère qu’il guérira avec le secours de cette femme qui a certainement une admirable connaissance des simples. — Des simples ! oui, plantes et hommes, capitaine, catégorie dans laquelle il me faudra vous ranger, si vous songez encore à cette affaire. Que vous deveniez fou d’amour pour une fillette, bon ! c’est le cas de plus d’un honnête homme ; mais vous tourmenter la caboche des momeries d’une vieille femme, c’est une trop grande sottise pour qu’on la passe à un ami. Parlez-moi de votre Minna, puisque tel est son nom, autant que vous voudrez ; mais vous n’avez aucun droit de troubler le cerveau de votre fidèle écuyer errant à propos de votre drôlesse de magicienne. Et maintenant que nous voici revenus au milieu des boutiques et des tentes que ces bonnes gens s’occupent à préparer… voyons et cherchons si nous ne pouvons pas trouver un peu de divertissement. Dans la joyeuse Angleterre, en pareille occasion, vous verriez deux ou trois bandes de comédiens ambulants, autant de mangeurs de feu et de sorciers ;