Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/347

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autant de ménageries d’animaux sauvages. Mais parmi ces braves gens, il n’y a rien qui ne sente le nécessaire ou l’utile… non, pas même une seule querelle entre mon joyeux compère Polichinelle et Jeanne sa moitié. »

Tandis que Bunce parlait ainsi, Cleveland jeta les yeux sur des habits d’une rare élégance qui, avec d’autres objets, étaient étalés sur le devant d’une boutique dont les ornements et les décors extérieurs étaient beaucoup plus soignés que les autres. Il y avait au dessus une petite enseigne de toile peinte, annonçant la variété des marchandises que le propriétaire de la boutique, Bryce Snailstoot, avait à vendre, et les prix raisonnables auxquels il se proposait de les offrir au public. Pour mieux attirer l’attention des passants, l’enseigne présentait de l’autre côté un dessin emblématique, représentant nos premiers pères revêtus de leur costume végétal avec cette légende :

Les malheureux pêcheurs, par le serpent déçus,
De feuilles aussitôt se couvrirent confus.
Si nos arbres n’ont point ou guère de feuillage,
Nous possédons le lin et la laine en partage ;
Le lin pour nos habits pompeux,
Et la laine pour les draps bleus.
Parure des gens du village.
De Lambmas[1] fillettes, galants,
Vous serez mes premiers chalands.

Tandis que Cleveland lisait ce précieux morceau de vers qui rappelaient à sa mémoire Claude Halcro, qui, poète lauréat de ces îles, et doué d’une verve toujours prête à travailler pour les petits comme pour les grands, devait en être l’auteur, le digne propriétaire de la boutique, apercevant le capitaine, se mit aussitôt et d’une main tremblante à serrer quelques uns des habits qu’il avait seulement exposés, attendu que la foire ne commençait que le lendemain, pour leur faire prendre l’air ou exciter l’admiration des promeneurs.

« Sur ma parole, capitaine, « dit Bunce bas à Cleveland, « il faut que ce drôle vous soit tombé quelque jour sous la patte, qu’il

  1. C’était une ancienne coutume qu’à la foire de Saint-Olla les jeunes gens de la classe commune et des deux sexes se réunissent par couples pendant le temps de la foire ; durant tout ce temps-là on appelait chaque couple frère et sœur de Lambmas. Il est aisé de concevoir que l’excessive familiarité qui provenait de cette coutume était sujette à bien des abus, d’autant plus que, dit-on, aucun scandale ne s’attachait aux indiscrétions qu’elle occasionnait. w. s.