Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/400

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pour lui. — Aussi braves qu’il vous plaira, repartit Claude Halcro, mais ce sont des coquins bien dangereux… Je connais ce drôle d’Altamont comme il s’appelle lui-même, quoique ce ne soit pas son vrai nom ; et c’est le chien le plus hargneux qui fît jamais retentir dans une grange des vers blancs ou même une sanglante querelle ; il débuta par Barnwell[1] et tout le monde pensa qu’il terminerait par la potence, comme la dernière scène de Venise sauvée[2]. — N’importe, répliqua Minna… plus les vagues sont furieuses, plus puissante est la voix qui les apaise. Le nom seul de Cleveland fait rentrer dans le devoir le plus féroce d’entre eux. — J’en suis fâché pour Cleveland, dit Brenda, si tels sont ses camarades… mais je m’inquiète fort peu sur son compte en comparaison de ce que je crains pour mon père. — Réservez votre compassion pour ceux qui en ont besoin, repartit Minna, et ne craignez rien pour notre père… Dieu sait que chacun des cheveux argentés qui recouvrent sa tête a plus de valeur à mes yeux que tous les trésors du monde ; mais je suis certaine qu’il est en sûreté sur ce vaisseau, et qu’il sera pareillement en sûreté à terre. — Je voudrais pouvoir l’espérer, dit Claude Halcro ; mais je crains que les magistrats de Kirkwall n’osent pas échanger le capitaine contre l’udaller, si Cleveland est en effet aussi redoutable que je le suppose. Les Écossais ont porté des lois fort sévères contre les pirates ; c’est ainsi qu’ils appellent ces marins-là. — Mais quels sont donc ces hommes qui se tiennent sur la route, dit Brenda, et pourquoi nous font-ils si mauvaise mine ? — C’est une patrouille de la milice, répondit Halcro ; le glorieux John les maltraite un peu… mais John était un jacobite…

Bouches sans bras, et de vaste dépense,
A charge en paix, en guerre humble défense,
Un jour par mois marchant en militaire,
Et toujours là s’il n’est pas nécessaire.


J’imagine qu’ils s’étaient d’abord arrêtés en nous prenant, lorsqu’ils nous virent sur le haut de la colline, pour un détachement des marins du sloop, et maintenant qu’ils peuvent distinguer que vous portez des cotillons, ils se remettent en marche. »

Ils approchèrent en effet, et comme l’avait supposé Claude Halcro, il se trouva que c’était une patrouille chargée de suivre tous

  1. Tragédie de Lillo. a. m.
  2. Tragédie d’Otway. a. m.