Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/412

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sa faveur, répondit Norna ; Pacolet m’attend-il dehors avec les chevaux ? »

Le vieux fossoyeur fit un signe affirmatif, et la pythonisse dit à Cleveland de la suivre de nouveau ; ils sortirent de l’appartement par une porte de derrière qui les conduisit dans un petit jardin dont l’état délabré répondait à celui de l’habitation qu’ils venaient de quitter. Les murailles à demi écroulées leur permirent de passer aisément dans un autre jardin plus vaste mais non pas mieux tenu, et une porte qui n’était fermée qu’au loquet les introduisit dans une ruelle longue et sinueuse où ils s’engagèrent d’un pas rapide ; Norna avertit tout bas son compagnon que c’était le seul endroit périlleux de leur route. Il faisait alors nuit noire, et les habitants des misérables maisons qui bordaient les deux côtés de cette rue étaient tous renfermés chez eux ; ils aperçurent seulement une femme sur sa porte, mais elle se signa et rentra précipitamment, lorsqu’elle vit le grand corps de Norna passer devant elle en faisant de longues enjambées. Ils arrivèrent enfin dans la campagne, où le nain muet de Norna attendait avec trois chevaux, caché derrière la muraille d’un hangar abandonné. Norna sauta aussitôt sur l’un des trois, Cleveland monta sur un autre, et suivit Pacolet qui monta sur le troisième ; ils s’avancèrent au grand trot à travers les ténèbres ; les animaux pleins d’activité et de feu qu’ils montaient étaient d’une race plus grande que celle des îles Shetland.

Après plus d’une heure de marche rapide, pendant laquelle Norna servit de guide, ils s’arrêtèrent devant une chaumière dont l’extérieur était si délabré, qu’elle ressemblait plutôt à une étable qu’à une cabane.

« Vous resterez là jusqu’à la pointe du jour, car c’est alors seulement qu’on pourra apercevoir votre signal du vaisseau, » dit Norna au capitaine en remettant les chevaux à la garde de Pacolet, et en désignant la porte de la misérable chaumière où elle entra. Elle l’eut bientôt éclairée en allumant la petite lampe de fer qu’elle portait ordinairement avec elle. « C’est un pauvre asile, mais un asile sûr, dit-elle ; car, si l’on venait nous chercher ici, la terre s’entr’ouvrirait sous nos pas, et nous recevrait dans ses entrailles avant qu’on pût nous saisir. Sachez, en effet, que cet endroit est consacré aux dieux de l’antique Valhalla… Et maintenant, dites-moi, homme pervers et sanguinaire, êtes-vous ami ou ennemi de Norna, seule prêtresse de ces divinités oubliées ? — Comment puis-je être votre ennemi, répliqua Cleveland ; la reconnaissance… » — La re-