Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/450

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la conclusion), comme des gens qui ne doivent jamais se revoir… » Et en effet, ils ne se revirent plus, car le vieux Mertoun, contre qui aucune accusation ne fut portée, disparut après que le sort de Cleveland fut décidé ; on pensa généralement qu’il s’était retiré dans un couvent étranger.

On apprendra en peu de mots quel fut le sort de Cleveland, suivant une lettre que Minna reçut deux mois après que l’Alcyon avait quitté Kirkwall. La famille était réunie à Burgh-Westra, et Mordaunt en était devenu un membre, le bon udaller ayant pensé qu’il ne pourrait jamais le récompenser assez d’avoir sauvé ses filles. Norna, qui commençait à revenir de son égarement d’esprit, se trouvait alors chez Magnus, et Minna, zélée dans ses attentions pour cette malheureuse victime de vaines illusions, était assise près d’elle, épiant chaque symptôme du retour de sa raison, lorsque la lettre dont nous parlons lui fut remise entre les mains.

« Minna, disait cette lettre, chère Minna !… adieu pour toujours… Croyez-moi, je ne vous voulus jamais de mal, jamais. Du moment où j’eus le bonheur de vous connaître, je résolus de quitter mes odieux camarades, et je formai cent projets qui ont été aussi inutiles qu’ils méritaient de l’être… Pourquoi et comment le sort d’une femme si aimable, si sage, si innocente, serait-il lié à celui d’un homme si coupable ?… Je ne parlerai plus de ces rêves. Ma triste situation est encore plus douce que je ne m’y attendais et que je ne l’avais mérité. Le peu de bien que j’aie fait en ma vie a compensé tous mes autres crimes dans l’esprit de juges honorables et compatissants. J’ai non seulement échappé à la mort ignominieuse qu’ont subie plusieurs de mes compagnons, mais encore le capitaine Weatherport, qui va partir pour la Nouvelle-Espagne, sous l’appréhension d’une guerre prochaine avec cette contrée, a généreusement sollicité et obtenu la permission de me donner du service, à moi et à deux ou trois autres de mes camarades moins coupables. Cette mesure lui fut suggérée, à lui par sa générosité naturelle, et aux autres par la connaissance que nous devons avoir des côtes et des parages. Quelle que soit la manière dont nous avons acquis cette position nouvelle, nous espérons nous en servir pour le bien de notre pays. Si la vertu peut donner le bonheur, je n’ai pas besoin de souhaiter que vous soyez heureuse, car alors vous l’êtes déjà… Adieu, Minna. »

Minna pleura si amèrement après avoir lu cette lettre, qu’elle attira l’attention de la convalescente Norna. Celle-ci arracha le pa-