Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/9

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Par cette mutuelle complaisance, nous obtînmes de notre exploration tous les résultats désirés ; pendant ce peu de jours, comme dit Allan Cunningham dans sa jolie chanson de mer,

Nous étions chez nous sur les ondes,
Nous étions de gais matelots.

Néanmoins un reflet de tristesse se mêle aux souvenirs de ce bonheur si pur. En revenant de la promenade qui nous avait fait éprouver tant de satisfaction, je trouvai que le destin avait inopinément privé le pays d’une femme digne du haut rang qu’elle occupait et qui depuis long-temps m’honorait de son amitié. La perte que nous fîmes ensuite d’un des membres de notre petite société, le plus intime ami que j’eusse au monde, jette aussi son amertume sur un passé plein de douceur.

Ici je dirai brièvement que mon but dans ce voyage, si toutefois l’on peut dire que j’en avais un, était de chercher à découvrir quelque localité convenable pour le Lord des Îles, poème dont je menaçais alors le public, et qui depuis a été publié avec un succès remarquable. Comme dans le même temps le roman anonyme de Waverley acquérait quelque renommée, j’augurais la possibilité d’une nouvelle tentative dans cette partie de la littérature. Je vis dans les îles sauvages des Orcades et des Shetland beaucoup de choses qui me parurent susceptibles de prendre un haut degré d’intérêt si un écrivain choisissait cette localité pour en faire le théâtre de quelque événement romanesque.

J’appris l’histoire de Gow le pirate d’une vieille sibylle, dont le principal moyen de subsistance était un commerce de vents favorables qu’elle débitait aux marins de Stromney. Rien n’est plus digne d’éloge que la bonté et l’hospitalité des propriétaires shetlandais ; je reçus là un accueil des plus affectueux, car plusieurs de ces hommes respectables avaient été les amis et les correspondants de mon père.

Je sentis le besoin de remonter d’une ou deux générations en arrière, pour trouver des matériaux d’après lesquels je pusse tracer le portrait du vieil udaller norwégien ; car la petite noblesse écossaise a généralement pris la place de la race primitive, le langage et les coutumes de celle-ci ont entièrement disparu. La seule différence que l’on puisse maintenant observer entre la manière de vivre de la classe aisée dans ces îles et celle que la même classe adopte en Écosse, consiste en ce que, la propriété étant plus éga-