Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/219

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ajoutait que, si Jacques avait pu se décider à former une résolution vigoureuse, il n’aurait pas été éloigné, surtout dans les dernières années de sa vie, de retirer sa faveur à Buckingham et de l’écarter de ses conseils. Mais s’il est vrai qu’il ait jamais médité un tel changement, il était trop timide et trop accoutumé à l’influence du duc pour trouver le courage de l’effectuer, et, dans tous les cas, il est certain que Buckingham, quoique survivant à un maître à qui il devait son élévation, eut le rare bonheur de jouir pendant deux règnes, sans le moindre affaiblissement, de la faveur la plus éclatante qu’ait jamais possédée un courtisan, faveur qui ne s’éteignit qu’avec sa vie, lorsqu’il tomba sous le poignard de son assassin Jelton.

Mais revenons à notre récit, interrompu par cette digression. Le prince s’avançait avec sa suite, et s’approchait de l’endroit où se trouvaient lord Glenvarloch et sir Mungo, qui s’étaient rangés comme les autres pour laisser le passage libre au prince, et lui donner les marques de respect ordinaires. Nigel put alors remarquer que lord Dalgarno marchait derrière le duc de Buckingham, et il lui sembla qu’il lui chuchotait quelque chose à l’oreille. Du moins est-il certain que l’attention du prince et du duc de Buckingham fut attirée sur Nigel, car ils tournèrent la tête de son côté, et le fixèrent attentivement, le prince, avec des regards dont l’expression sérieuse et mélancolique était mêlée de sévérité, Buckingham, d’un air hautain et railleur, qui indiquait un triomphe insultant. Lord Dalgarno ne parut pas remarquer son ami, peut-être à cause des rayons du soleil qui, donnant du côté de l’allée où se trouvait Nigel, obligeaient Malcolm à tenir son chapeau devant ses yeux.

Lorsque le prince passa, lord Glenvarloch et sir Mungo s’inclinèrent comme le respect l’exigeait, et le prince, leur rendant leur salut avec cette gravité cérémonieuse qui accorde à chacun ce qui est dû à son rang, mais rien au-delà, fit signe à sir Mungo de s’avancer ; celui-ci, tout en se mettant en devoir d’obéir, commença une apologie sur son infirmité, qui le privait d’aller plus vite, et ne la termina que lorsqu’il fut arrivé tout en boitant auprès du prince. Sir Mungo prêta une oreille attentive et intelligente, en apparence, à des questions qui lui furent faites d’un ton tellement bas, que le chevalier y eût certainement été sourd, si tout autre que le prince de Galles les lui eût adressées. Après une minute de conversation, le prince jeta sur Nigel un autre de