Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/261

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vous avez raison, madame, et que les comparaisons ne sont pas des arguments ; du moins les miennes ne m’ont pas amenée là où j’en voulais venir. — Sur ma parole, Marguerite, » dit la dame en souriant, « vous semblez avoir beaucoup rêvé sur ce sujet depuis quelque temps. — Peut-être trop, madame, » dit Marguerite, mais si bas qu’elle ne pouvait être entendue que de la dame derrière la chaise de laquelle elle s’était placée. Ces mots furent prononcés d’un ton sérieux, et accompagnés d’un soupir étouffé qui n’échappa pas à l’attention de la personne à laquelle ils étaient adressés. Lady Hermione se retourna vivement, et regarda fixement Marguerite ; elle réfléchit un instant, et ordonna à Monna Paula de porter son métier à tapisserie dans la pièce voisine. Quand elles furent seules, elle engagea sa jeune amie à quitter le dossier de sa chaise et à venir s’asseoir sur un tabouret à côté d’elle.

« Je resterai là, madame, si vous voulez bien me le permettre, » répondit la jeune fille sans changer de posture ; « je désirerais que vous pussiez m’entendre sans me voir. — Au nom du ciel ! ma chère fille, que pouvez-vous donc avoir à me dire pour n’oser le faire en face d’une aussi sincère amie que moi ?

Sans faire de réponse directe, Marguerite se contenta de dire : « Vous aviez bien raison, madame, en disant que je rêve beaucoup depuis quelque temps. J’ai eu bien tort, et vous allez être bien fâchée contre moi, ainsi que mon parrain ; mais il est trop tard, et il faut le sauver. — Le !… répéta lady Hermione, voilà un petit mot qui explique le mystère ; mais sortez de derrière cette chaise, petite folle que vous êtes. Je gagerais que vous n’avez pas su défendre votre cœur contre ce malin apprenti de votre père… Je ne vous ai pas entendue parler du jeune Vincent depuis quelque temps ; si son nom n’était plus dans votre bouche, son souvenir n’était peut-être pas effacé de votre pensée. Auriez-vous été assez imprudente pour lui permettre de s’expliquer sérieusement ? On dit que le jeune homme est hardi. — Pas assez, madame, pour rien dire qui puisse me déplaire, répondit Marguerite. — Peut-être voulez-vous dire que cela ne vous a pas déplu, reprit la dame, ou peut-être n’a-t-il pas parlé ; ce qui serait encore plus sage. Soyez franche et sans détours, ma petite amie… Votre parrain ne tardera pas à revenir, et nous l’admettrons dans nos consultations. Si le jeune homme est laborieux et né de parents honnêtes, sa pauvreté ne saurait être un obstacle insur-