Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/476

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sur le champ de bataille qu’au moment où la balle venait de partir. Richie, qui voulait s’attacher à Colepepper, ayant vu ce scélérat occupé à dévaliser le cheval du page, lui porta un coup si violent que le capitaine faillit en tomber. Au même instant le cheval de Richie démonta son cavalier qui n’était pas à la vérité le premier écuyer de son temps.

L’intrépide Moniplies se releva aussitôt, et lutta si bravement contre le spadassin, que celui-ci fut terrassé, quoique très-robuste, et quoiqu’il se battît en désespéré. L’Écossais lui arracha des mains un long couteau, lui porta un coup terrible avec cette arme et se redressa sur ses pieds : le blessé s’efforçant de suivre son exemple, il le frappa sur la tête avec la crosse de son mousquet. Ce dernier coup fut mortel.

« Bravo, Richie ! » dit Lowestoffe, qui lui-même avait déjà croisé le fer avec un des brigands et l’avait bientôt mis en fuite ; « bravo ! Eh mais, ami, voilà le péché assommé comme un bœuf, et la tête de l’iniquité tranchée comme celle d’un veau. — Je ne sais pourquoi vous me reprocheriez mon premier état, maître Lowestoffe, » répondit Richie avec un grand sang-froid ; mais je puis vous assurer que la boucherie n’est pas un si mauvais endroit pour dresser à cette espèce d’ouvrage.

En cet instant le second Templier cria de toute sa force : « Si vous êtes des hommes, accourez ici… Lord Dalgarno vient d’y être assassiné ! »

Lowestoffe et Richard coururent au lieu désigné, et le page, voyant que personne ne s’occupait de lui, profita de ce moment pour s’échapper ; à partir de ce jour, on ne sut jamais ce qu’il était devenu, pas plus que la somme considérable dont le cheval était chargé.

Le troisième brigand n’avait pas attendu l’attaque du Templier et de Jin Vin, qui avait fait descendre le vieux Christie de dessus son cheval, afin que sa marche fût moins lente. Ces cinq personnes étaient arrêtées et regardaient avec horreur le corps ensanglanté du jeune gentilhomme, et l’égarement de la douleur auquel était livrée la femme qui s’arrachait les cheveux et poussait des cris de désespoir. Tout à coup ses angoisses furent calmées, ou plutôt elles prirent une nouvelle direction par la présence subite et inattendue de son mari. Celui-ci, jetant sur elle un regard froid et sévère, lui dit d’un ton en harmonie avec ce regard : « Ah, femme ! tu prends à cœur la perte de ton amant. »