Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/67

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C’est Laurie Linklater, un des employés de la cuisine, et qui a été long-temps apprenti chez mon père. — Un employé dans la cuisine, un marmiton ! » s’écria lord Nigel en parcourant la chambre.

« Mais réfléchissez, milord, » dit Richie avec calme, « que tous vos grands amis s’éloignaient de vous, et que loin d’être disposés à présenter votre pétition, ils ont à peine eu l’air de vous connaître : enfin je souhaiterais de tout mon cœur, dans l’intérêt de Votre Seigneurie, dans le mien, et surtout dans celui du pauvre garçon, que Laurie eût un emploi plus élevé ; cependant Votre Honneur doit penser qu’un marmiton de la cour, si quelqu’un qui appartient à la très-royale cuisine du roi peut être appelé un marmiton, peut bien aller de pair avec un maître cuisinier tout autre part, car, comme je le disais tout à l’heure, le son du roi…

— Vous avez raison, et c’est moi qui avais tort, dit le jeune lord, je n’ai pas le choix des moyens pour faire parvenir mes réclamations, et pourvu que ces moyens soient honnêtes…

— Laurie est le plus honnête garçon qui ait jamais touché une cuiller à pot, non que je veuille dire par là qu’il ne sait pas se lécher les doigts tout comme un autre, et en cela il n’a pas tort. Mais pour couper court, car je vois que Votre Honneur s’impatiente, il me mena au palais où tout était en mouvement, parce que le roi allait partir pour chasser du côté de Blackeat, à ce qu’il m’a semblé entendre dire. Il y avait là un cheval avec tous ses harnais, le plus beau cheval gris qu’ait jamais produit une cavale, et la selle, les étriers, le mors et la gourmette étaient d’or éclatant, ou du moins d’argent doré. Bref, monsieur, le roi descendit avec tous ses nobles ; il était vêtu d’un habit de chasse vert, couvert de broderies et de galons d’or. Je reconnus bien sa figure, quoiqu’il y eût bien long-temps que je ne l’eusse vu… Par ma foi, mon garçon, pensais-je en moi-même, les temps sont bien changés depuis que vous dégringoliez un escalier dérobé du vieux palais d’Holy-Rood, transi de peur, et tenant à la main votre calotte que vous n’aviez pas eu le temps de mettre, tandis que Frank Stuart, l’enragé comte de Bothwell, était sur vos talons ; et si le vieux comte de Glenvarloch n’eût enveloppé son bras de son manteau, et reçu plus d’une blessure pour vous défendre, vous ne chanteriez pas si haut aujourd’hui. En pensant à tout cela il m’était impossible de m’imaginer que la supplique de Votre Honneur pût manquer d’être bien reçue : et je me lançai au milieu de la foule des seigneurs. Laurie crut que j’étais