Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/534

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découvrir son complot à temps, et, s’il était possible de l’inviter alors à mettre sa personne en sûreté.

Mais nous devons les laisser en ce moment méditer leurs plans à loisir. Comme ils dépendaient tous de leur évasion préalable hors du lieu où ils étaient retenus, l’exécution n’en paraissait guère assurée.



CHAPITRE XLIV.

VENGEANCE.


Ils firent tous le saut périlleux, les uns pour se sauver, les autres croyant obéir à la voix du ciel qui les invitait ; ceux-ci pour avancer, ceux-là par amour du gain : moi je sautai par un mouvement de gaieté.
Shakspeare. Le Rêve d’une nuit d’été.


Après une conversation particulière avec Bridgenorth, Christian se rendit en toute hâte à l’hôtel du duc de Buckingham, en prenant la route où il était le moins exposé à rencontrer des gens de connaissance. Il fut introduit dans l’appartement du duc, qu’il trouva cassant et croquant des noisettes, avec un flacon de vin blanc à côté de lui. « Christian, dit Sa Grâce, venez donc m’aider à rire : j’ai mordu sir Charles Sedley je lui ai gagné mille pièces d’or, par les dieux ! — Je suis content de votre bonheur, milord duc, répliqua Christian ; mais je viens ici pour affaires sérieuses. — Sérieuses ! ma foi, je crois vraiment que je ne serai plus sérieux de ma vie… Ah ! ah ! ah !… Du bonheur, dites-vous ? je n’ai rien de tel : c’est mon génie, c’est une idée excellente. Si ce n’était que je ne me soucie pas de faire un affront à la fortune, comme le vieux général grec, je pourrais lui dire en face : Vous n’avez eu aucune part à l’affaire. Vous avez ouï dire, Ned Christian, que la mère Creswell est morte ? — Oui, j’ai entendu dire que le diable s’était emparé de son bien. — Mais, Christian, vous êtes un ingrat, car je sais que vous êtes son obligé comme bien d’autres. Par saint George ! c’était une vieille dame très-bienveillante et très-secourable, et pour qu’elle ne dormît pas dans une tombe sans gloire, j’ai gagé, m’entendez-vous, avec Sedley que j’écrirais son oraison funèbre ; que chaque mot serait à la louange de sa vie et de ses mœurs ; que tout y serait vrai ; et que pourtant le diocésain ne pourrait point pincer Quodling, mon petit chapelain, qui la débiterait. — Je vois parfaitement la difficulté, milord, » dit Christian, qui savait bien que, s’il voulait cap-