Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/233

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monts Grampiens[1], et surtout des beautés de Glen-Houlakin, il marchait tout aussi fréquemment avec Hayraddin à la tête de la petite cavalcade, le questionnant sur la route, sur les lieux de halte, et gravant ses réponses dans sa mémoire, afin d’être à portée de reconnaître, par de nouvelles questions, s’il ne méditait pas quelque trahison. Souvent aussi on le voyait à l’arrière-garde, tâchant de s’assurer l’attachement des deux hommes d’escorte par des paroles de bonté, par des présents, et par les promesses de nouvelles récompenses aussitôt que leur tâche serait remplie.

Ils voyagèrent de cette manière pendant plus d’une semaine, suivant des chemins écartés et des routes détournées, traversant des cantons peu fréquentés, afin d’éviter les grandes villes. Il ne leur arriva rien de remarquable, si ce n’est que de temps en temps ils rencontraient des hordes errantes de Bohémiens, qui les respectaient comme étant sous la conduite d’un individu de leur caste ; des soldats traînards, ou peut-être des bandits, qui, trouvant la partie trop inégale, s’abstenaient de les attaquer ; enfin, des détachements de la maréchaussée, comme on nommerait à présent ces militaires, et que Louis, qui sondait et cautérisait les plaies du pays avec le fer et le feu, employait pour détruire les bandes effrénées qui infestaient le royaume. Ces derniers les laissaient poursuivre leur voyage sans les inquiéter, en vertu d’un ordre écrit dont Quentin avait été muni à cet effet par le roi lui-même.

Leurs lieux de halte étaient le plus ordinairement des monastères, dont la plupart étaient obligés par les règles de leur fondation de recevoir les pèlerins ; comme les dames voyageaient sous ce titre, elles recevaient l’hospitalité, sans qu’il leur fût adressé aucune question sur leur rang et leur condition : en effet, il était d’usage que les personnes de distinction qui voyageaient pour accomplir un vœu cachassent leur nom et leur qualité. En arrivant, les comtesses de Croye prétextaient ordinairement la fatigue pour se livrer au repos, et Quentin, en sa qualité de majordome, déployait, dans les arrangements qu’il était nécessaire de prendre avec leurs hôtes, une sagacité qui leur épargnait beaucoup d’embarras, en même temps qu’une promptitude qui ne manquait jamais d’exciter un sentiment d’affection et de reconnaissance chez celles qui étaient l’objet de tant de soins.

Une chose cependant était pour Quentin une cause d’inquiétude presque journalière : son guide, appartenant à une caste

  1. Montagnes d’Écosse. a. m.