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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/391

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tron est comme les anciens Césars de Rome, qui, lorsqu’ils étaient réduits à la dernière extrémité, et qu’ils se voyaient, comme nous disons, au pied de l’échelle, choisissaient parmi les ministres de leur justice quelque homme habile et expérimenté qui pût épargner à leur personne sacrée la tentative maladroite d’une main novice ou peu légère dans l’exécution de nos mystères. C’était une excellente coutume pour les païens, mais, comme bon catholique, je me ferais scrupule de porter la main sur le roi très-chrétien. — Bah ! vous êtes trop scrupuleux, confrère, dit Petit-André ; si le roi donne l’ordre de sa propre exécution, je ne vois pas quel droit nous aurions d’y résister. Celui qui vit à Rome doit obéir au pape. Les gens du grand prévôt doivent exécuter les ordres de leur maître, comme lui-même ceux du roi. — Silence, drôles ! dit le grand prévôt ; il ne s’agit nullement de la personne du roi, mais bien de celle de cet hérétique grec, de ce païen, de ce sorcier mahométan, Martius Galeotti. — Galeotti ! reprit Petit-André : cela me semble beaucoup plus naturel ; je n’ai jamais connu aucun de ces faiseurs de tours passant leur vie, comme on peut dire, à danser sur une corde horizontale, qui ne l’ait terminée par une dernière gambade au bout d’une corde perpendiculaire… Tchick[1] ! — Mon seul regret, » dit Trois-Échelles en levant les yeux au ciel, c’est que cette pauvre créature mourra sans confession. — Bon ! bon ! reprit le grand prévôt ; c’est un hérétique, bien certainement un nécromancien : l’absolution d’un couvent entier de moines ne pourrait le soustraire à la damnation éternelle. D’ailleurs, s’il désire se confesser, tu peux fort bien, Trois-Échelles, lui servir de père spirituel. Mais ce qui est plus important, c’est que je crains que vous ne soyez forcés de faire usage du poignard, camarades, car vous n’avez pas ici les instruments nécessaires à l’exercice de votre profession. — Veuille Notre-Dame de Paris me préserver d’être jamais pris au dépourvu lorsqu’il s’agit d’exécuter les ordres du roi ! s’écria Trois-Échelles. Je porte toujours sur moi un cordon de Saint-François qui me fait quatre fois le tour du corps, et à l’extrémité duquel il y a un joli nœud coulant ; car je suis de la confrérie de Saint-François, et je pourrai en porter le froc quand je serai in extremis… grâce à Dieu et aux bons pères de Saumur. — Et moi, dit Petit-André ; j’ai toujours en poche une bonne poulie,

  1. Dernier cri du pendu. a. m.