Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/394

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En ce cas, nous consulterons vos aises, et nous vous ferons porter. J’ai ici à la porte une dizaine de robustes Bourguignons que Crèvecœur m’a donnés à cet effet ; car il est bon que vous sachiez que mon ami Charles de Bourgogne et moi nous n’avons pas enlevé à notre cousin sa couronne qu’il a été assez âne pour mettre en notre pouvoir, mais que nous nous sommes contentés de la limer un tant soit peu ; cependant, quoique réduite à l’épaisseur d’une paillette, elle n’en est pas moins d’or pur. En termes clairs, Louis est encore le souverain des gens de sa suite, y compris votre personne, et de plus roi très-chrétien de la vieille salle à manger du château de Péronne, dans laquelle, vous, son sujet lige, vous êtes tenu de vous rendre sur-le-champ. — Je vous suis, monsieur, » répondit Galeotti. Et il marcha derrière le Glorieux, convaincu sans doute qu’il ne lui restait aucun moyen d’évasion. — « Ma foi, » lui dit le fou chemin faisant, « vous faites fort bien, car nous traitons notre cousin Louis comme on traite un vieux lion affamé dans sa loge, et à qui, de temps à autre on jette un veau pour exercer ses vieilles mâchoires. — Prétendez-vous dire que le roi ait l’intention de me faire subir quelque mauvais traitement ? — C’est ce que vous pouvez deviner mieux que moi ; car, quoique la nuit soit obscure, je parierais que vous n’en voyez pas moins les astres à travers les nuages. Quant à moi, je ne sais rien à ce sujet. Seulement ma mère m’a toujours dit qu’il ne fallait approcher qu’avec précaution d’un vieux rat pris dans une trappe, attendu qu’il n’est jamais plus disposé à mordre. »

L’astrologue ne poussa pas plus loin ses questions ; mais le Glorieux, suivant la coutume des gens de sa profession, continua à lui débiter à tort et à travers une foule de sarcasmes et de railleries malignes, jusqu’à ce qu’ils fussent arrivés devant la porte du château. Après avoir passé successivement de poste en poste, l’astrologue fut introduit dans la tour du comte Herbert.

Les vagues propos du fou n’avaient pas été perdus pour Galeotti, et les soupçons qu’ils avaient fait naître en lui furent confirmés à ses yeux par le regard et les manières de Tristan ; car l’air sombre et taciturne du grand prévôt lorsqu’il le conduisit à la chambre à coucher du roi, paraissait de mauvais augure. Observateur attentif de ce qui se passait sur la terre, non moins que de la marche des corps célestes, la poulie et la corde n’échappèrent point à l’astrologue ; et la corde encore en vibration lui fit reconnaître que ces préparatifs venaient à peine d’être terminés au mo-