Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/417

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

résistance à attendre de sa part, contre la recherche d’un tel prétendant. Varium et mutabile[1], Philippe. — Il serait possible qu’en cette occasion Votre Majesté appréciât mal la courageuse obstination de cette jeune dame. Elle sort d’une race volontaire et opiniâtre ; et j’ai su de Crèvecœur qu’elle a conçu un attachement romanesque pour un jeune écuyer, qui, il faut en convenir, lui a rendu de grands services pendant son dernier voyage. — Ah ! s’écria le roi, un archer de ma garde, nommé Quentin Durward ? — Lui-même, je le crois du moins ; il a été fait prisonnier avec la comtesse ; ils voyageaient, pour ainsi dire, seuls. — Bénis soient Notre-Seigneur, Notre-Dame, monseigneur saint Martin et monseigneur saint Julien ! Honneur et gloire au savant Galeotti, qui a lu dans les astres que la destinée de ce jeune homme était liée à la mienne ! Si cette jeune demoiselle lui est assez attachée pour se rendre rebelle à la volonté du Bourguignon, ce Quentin m’aura rendu un bien signalé service. — D’après ce que m’a dit Crèvecœur, je crois, Sire, qu’on peut compter sur l’obstination de la comtesse Isabelle. D’un autre côté, le noble duc d’Orléans lui-même, malgré la supposition qu’il a plu à Votre Majesté de faire, ne renoncera pas facilement sans doute à sa belle cousine, à laquelle il est engagé depuis si long-temps. — Que dites-vous là, mon cher Philippe ? Mais vous n’avez jamais vu ma fille Jeanne ; c’est une chouette, une véritable chouette dont je suis honteux ! Mais, peu importe ! qu’il se montre raisonnable, qu’il l’épouse ; je lui permettrai ensuite d’être fou d’amour pour la plus belle dame de France. Revenons à notre affaire, Philippe : vous m’avez sans doute déroulé maintenant toute la carte des dispositions de votre maître ? — Je vous ai fait connaître. Sire, les points sur lesquels il est, quant à présent, le plus disposé à insister. Mais Votre Majesté n’ignore pas que les dispositions du duc ressemblent à un torrent qui s’avance sans fracas quand ses vagues ne rencontrent aucune résistance, et dont il est impossible de prévoir le cours qu’il prendra si un obstacle vient exciter sa furie. S’il arrivait inopinément des preuves plus claires des pratiques de Votre Majesté avec les Liégeois et Guillaume de la Marck (pardonnez-moi l’expression, le temps presse et nous dispense de toute cérémonie), les conséquences pourraient en être terribles. Il est arrivé d’étranges nouvelles de ce pays ; on dit que de la Marck a épousé la comtesse

  1. Le sexe est volage. Les dames nous pardonneront de traduire ainsi cette citation, que la galanterie française nous défend de compléter. a. m.