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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/444

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contrairement à vos devoirs comme vassal de la couronne de France, et à la foi observée parmi les princes chrétiens. Pour cette raison, mon dit noble et vénérable maître vous somme par ma bouche de mettre son royal allié le roi très-chrétien immédiatement en liberté, ou de recevoir le défi que je suis autorisé à vous porter de sa part. — Avez-vous fini ? — Oui, et j’attends la réponse de Votre Altesse avec la confiance qu’elle préviendra l’effusion du sang humain. — Eh bien ! par saint Georges de Bourgogne ! » s’écria le duc ; mais avant qu’il pût en dire davantage, Louis se leva, et prit la parole d’un air si plein de dignité et de majesté que Charles n’osa l’interrompre. — « Beau cousin de Bourgogne, avec votre permission, dit-il, nous réclamons la priorité pour répondre à cet impudent… Coquin de héraut, ou qui que tu sois, va dire au meurtrier, au parjure Guillaume de la Marck, que le roi de France sera bientôt devant Liège, dans l’intention de punir le meurtre sacrilège de son bien-aimé parent Louis de Bourbon, et qu’il se propose de faire attacher de la Marck tout vif à une potence, pour l’insolence qu’il a de me dire son allié et de placer mon nom royal dans la bouche d’un de ses vils messagers. — Et tu ajouteras de ma part, dit Charles, tout ce qu’un prince peut avoir à dire à un brigand et à un assassin. Va-t’en… Mais non, attends un instant : jamais héraut n’a quitté la cour de Bourgogne sans avoir occasion de crier largesses : qu’on le fouette jusqu’à lui enlever la peau. — Nous demandons à Votre Altesse la permission de lui faire observer, » s’écrièrent à la fois Crèvecœur et d’Hymbercourt, « que cet homme étant un héraut, il doit jouir des privilèges qui leur appartiennent. — Est-ce bien vous, messieurs, répliqua le duc, qui êtes assez simples pour croire que le tabard[1] fait le héraut ? Les armoiries même de ce malheureux me prouvent qu’il n’est qu’un imposteur. Que Toison-d’Or s’avance et qu’il le questionne en notre présence. »

En dépit de son effronterie naturelle, l’envoyé du Sanglier des Ardennes pâlit, et l’on s’en aperçut malgré plusieurs couches de vermillon qu’il avait étendues sur son visage. Toison-d’Or, chef des hérauts du duc, comme nous l’avons dit ailleurs, et roi d’armes dans ses domaines, s’avança de l’air d’un homme qui savait ce qui était dû à sa place, et demanda à son frère supposé dans quel collège il avait étudié la science qu’il professait.

  1. Vêtement qui a quelque ressemblance avec la dalmatique que les diacres et les sous-diacres portent pendant la messe, lorsqu’ils assistent l’officiant à l’autel. a. m.