Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/267

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

niquer à présent la nature ou l’étendue. Vous pouvez juger de son importance, puisque, dans le seul motif de m’emparer de votre personne, je suis descendu jusqu’à me mêler aux coquins qui détruisirent la pêcherie de ce misérable quaker. Qu’il se fût attiré tout mon mépris, que j’eusse été mécontent d’une invention sordide par laquelle il ruinait les plaisirs qu’on pouvait trouver à une pêche plus noble, c’est assez vrai ; mais si leur destruction n’eut pas favorisé mes projets sur vous, il aurait pu conserver, en ce qui me touche, ses filets à pieux jusqu’à ce que la marée cessât de monter et de descendre dans la Solway.

— Hélas ! m’écriai-je, mon malheur est plus que doublé quand je pense que j’ai été la cause involontaire de celui d’un homme honnête, qui était mon ami.

— Ne vous chagrinez pas ; l’honnête Josué est de ces gens qui, par de longues prières, peuvent se mettre en possession des maisons des veuves : — il saura bien réparer ses pertes. Quand ils éprouvent un pareil accident ; lui et les autres hypocrites de son espèce demandent au ciel de les indemniser, comme ils réclameraient une dette ; et en règlement de comptes, ils exercent leurs brigandages sans aucun scrupule, jusqu’à ce qu’ils aient mis la balance de niveau, ou même qu’ils l’aient fait pencher en leur faveur. Mais en voici assez sur ce sujet quant à présent. — Il faut que je change immédiatement de résidence : à la vérité, je ne redoute pas qu’un excès de zèle pousse M. Foxley ou son greffier à des mesures extrêmes ; pourtant le malheur qui m’est arrivé d’être reconnu par ce misérable fou leur rend beaucoup plus difficiles les ménagements à mon égard, et je ne dois pas mettre leur patience à une trop rude épreuve. Il faut vous préparer à m’accompagner, soit comme captif, soit comme compagnon : dans ce dernier cas, vous me donnerez votre parole d’honneur de ne point chercher à vous évader. Si vous étiez si mal avisé que de manquer à votre serment, soyez bien persuadé que je n’hésiterais pas un seul instant à vous briser le crâne.

— J’ignore vos intentions et vos plans, répliquai-je, et je ne puis les considérer que comme dangereux. Je n’entends pas aggraver ma situation présente par une résistance inutile contre la force supérieure qui me retient prisonnier ; mais je ne renoncerai jamais au droit de reprendre ma liberté dès que l’occasion favorable s’en présentera. Je préfère donc vous suivre en captif plutôt qu’en allié.