Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/83

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En conversant de la sorte, ils regagnèrent la pelouse qui s’étendait devant la maison d’Arnold Biederman, où les luttes des jeunes gens avaient fait place à des danses qu’exécutait la jeunesse des deux sexes. La danse était conduite par Anne de Geierstein et le jeune étranger, arrangement qui, bien que le plus naturel, puisque c’était leur hôte, et que celle-là remplissait les fonctions d’une maîtresse de maison, occasionna un regard que le landamman échangea avec Philipson, comme si la chose avait eu quelque rapport avec les soupçons qu’il avait récemment exprimés.

Mais aussitôt qu’elle aperçut son oncle et le marchand étranger, Anne de Geierstein profita d’un premier instant de repos pour quitter la danse et venir causer avec son parent, comme des affaires domestiques confiées à ses soins. Philipson observa que son hôte écoutait sérieusement les communications de sa nièce, et, lui répondant par un signe de tête fait avec toute sa franchise habituelle, il parut lui annoncer que sa requête serait favorablement considérée.

La famille fut aussitôt après engagée à prendre le repas du soir, qui consistait principalement en excellent poisson fourni par les ruisseaux et les lacs voisins. Une large coupe contenant ce qu’on appelait schlaf-trinck, ou breuvage du sommeil, circula alors autour de la table. Elle fut d’abord entamée par le maître de la maison, puis passée à la jeune fille qui n’y goûta que modestement, ensuite remise aux deux étrangers, et enfin vidée par le reste de la compagnie. Tels étaient alors les sobres usages de la Suisse, tellement corrompus dans la suite par leurs rapports avec des nations plus adonnées au luxe. Les hôtes furent conduits dans les appartements où ils devaient passer la nuit, et où Philipson et le jeune Arthur occupèrent la même couche. Bientôt après tous les habitants de la maison furent plongés dans un profond sommeil.