Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/171

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veux pas vous croire envieux. N’avez-vous pas remarqué que Rothsay fut le premier à proposer ce mode de maintenir la paix dans les montagnes, que votre expérience a présenté sous le meilleur jour, et qui a été généralement approuvé… et tout à l’heure même, ne nous serions-nous pas levés en oubliant une affaire capitale, s’il ne nous eût rappelé la querelle avec les citoyens ? — Je ne doute pas, mon souverain, » dit le duc d’Albany avec le ton d’approbation que le roi semblait demander, « que mon royal neveu ne rivalise bientôt de sagesse avec son père. — Ou, dit le duc de Rothsay, je puis trouver plus facile d’emprunter à un autre membre de ma famille cet heureux et commode manteau d’hypocrisie qui couvre tous les vices, et alors peu importe qu’on les ait ou non. — Milord prieur, » dit le duc s’adressant au dominicain, « nous prierons Votre Révérence de s’absenter un instant. Sa Majesté et moi, nous avons à dire au prince des choses que ne peut entendre personne, pas même vous. »

Le dominicain s’inclina et sortit.

Quand les deux royaux frères furent laissés seuls avec le prince, le roi parut extrêmement embarrassé et abattu, Albany, triste et recueilli, tandis que Rothsay lui-même s’efforçait de déguiser certaine inquiétude sous son air habituel de légèreté. Il y eut un silence d’une minute ; à la fin, Albany parla.

« Royal frère, dit-il, le prince mon neveu accueille si mal les remontrances qui sortent de ma bouche, que je prierai Votre Grâce de prendre elle-même la peine de lui dire ce qu’il est fort convenable qu’il sache. — Il faut, en effet, que cette communication soit peu agréable, si milord d’Albany ne peut l’entortiller de paroles meilleures, dit le prince. — Trêve d’effronterie, jeune homme, » répondit le roi avec colère. « Vous parliez à l’instant de la querelle avec les citoyens… Qui a occasionné cette querelle, David ?… Quels hommes ont escaladé la fenêtre d’un paisible citoyen, d’un fidèle sujet, alarmé de nuit la ville par des torches et des cris, et exposé nos vassaux au péril et à la frayeur. — Plus à la frayeur qu’au péril, j’imagine, répliqua le prince : comment puis-je dire quels hommes ont causé ce tumulte nocturne ? — Il y avait dans cette esclandre un homme de ta suite, continua le roi, un homme de Bélial, que j’aurai soin de punir comme il l’a mérité. — À ma connaissance, il n’y a personne parmi mes gens qui mérite le déplaisir de votre Altesse, répartit le prince. — Point de subterfuges, jeune homme… Où étais-tu la veille de la Saint-Valentin ?