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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/240

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par les ruelles étroites, situées à l’extrémité de la ville du côté du nord, à travers lesquelles Henri Smith avait précédemment escorté Louise. Mais ces ruelles, ordinairement solitaires, étaient alors remplies de monde : tant l’alarme avait été générale ! Cependant Catherine Glover parvint à se frayer un passage, mais tous ceux qui la remarquaient se regardaient l’un l’autre et secouaient la tête en signe de compassion. Enfin, sans se rendre bien compte de ce qu’elle faisait, elle s’arrêta devant la porte de son amant et frappa.

Le silence qui succéda au bruit redoublé du marteau accrut l’inquiétude qui l’avait poussée à cette démarche désespérée.

« Ouvrez, ouvrez Henri ! s’écria-t-elle, ouvrez si vous vivez encore ! ouvrez, si vous ne voulez pas trouver Catherine Glover morte sur le seuil de votre porte. »

Pendant qu’elle poussait ces cris frénétiques, adressés à des oreilles qu’elle croyait fermées par la mort, son amant en personne ouvrit la porte juste à temps pour l’empêcher de tomber à terre. L’excès de la joie de Catherine à une apparition si inattendue ne peut se comparer qu’à la surprise qui l’empêchait de la croire réelle, et à l’effroi que Henri éprouva en voyant les yeux fermés de son amante, ses lèvres pâles, l’absence de sa respiration et son teint décoloré.

Henri était resté au logis en dépit des cris d’alarme qui, depuis long-temps, étaient parvenus jusqu’à lui, bien déterminé à ne se mêler d’aucune querelle qu’il pourrait éviter. Ce n’était que pour se conformer aux ordres exprès des magistrats à qui, en sa qualité de bourgeois, il devait obéissance, que prenant son épée et son bouclier, il se préparait, à contre-cœur pour la première fois, à remplir le service qu’on exigeait de lui.

« Il est cruel, se disait-il, d’être mis en avant dans toutes les émeutes de la ville, quand les combats sont si en horreur à Catherine. Il y a, j’en suis sûr, assez de filles dans Perth qui disent à leur galant : « Va… fais ton devoir bravement, et gagne les bonnes grâces de ta maîtresse, » et ce ne sont pas ces amants-là qu’on envoie chercher, c’est moi, qui ne puis remplir mon devoir d’homme en protégeant une fille malheureuse, ni mon devoir de bourgeois en combattant pour l’honneur de ma ville sans que cette capricieuse Catherine me traite comme si j’étais un tapageur et un habitué de mauvais lieux. »

Telles étaient les pensées qui occupaient son esprit, lorsqu’ou-