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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/287

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l’est, ornée de vitraux peints de couleurs brillantes et variées, répandait un torrent de lumière sur le maître-autel ; sur le cercueil placé en face, étaient étendus les restes mortels de l’homme assassiné, les bras ramenés sur la poitrine, et les mains appliquées l’une contre l’autre avec les doigts levés en l’air, comme si cette chair insensible demandait elle-même au ciel vengeance contre celui qui avait violemment chassé l’esprit immortel de son enveloppe mutilée. Auprès du cercueil était le trône où était assis Robert d’Écosse et son frère Albany. Le prince était assis sur un siège moins élevé, à côté de son père, arrangement qui excita quelques observations ; car le siège d’Albany ne différant guère de celui du roi, l’héritier présomptif, quoique majeur, semblait rabaissé au-dessous de son oncle en présence de tout le peuple de Perth assemblé. Le cercueil était placé de manière que la majorité des individus réunis dans l’église pussent voir le cadavre.

Près de la tête du mort se tenait debout le chevalier de Kinfauns, poursuivant ; et à l’autre extrémité le jeune comte Crawford, représentant le défendeur. Le témoignage du duc de Rothsay avait affranchi sir John Ramorny de la nécessité de comparaître pour se soumettre à l’épreuve, et il s’était prévalu de sa maladie pour rester chez lui. Sa maison, y compris ceux qui, bien qu’attachés à sir John, étaient considérés comme au service du prince, et qui n’avaient point encore été congédiés, se composait de huit ou dix personnes. La plupart de ces serviteurs étaient regardés comme des hommes de mœurs extrêmement licencieuses, et que par conséquent on pouvait croire capables d’avoir assassiné le bonnetier dans la débauche d’une soirée de fête. Ils étaient rangés sur une ligne du côté gauche de l’église, et portaient une espèce de casaque blanche, semblable à l’habit d’un pénitent. Tous les yeux étaient fixés sur eux ; et plusieurs paraissaient si déconcertés que les spectateurs y voyaient de fortes preuves de leur culpabilité. Le visage du véritable meurtrier ne pouvait le trahir ; ce visage impassible et sombre que ni la joie d’une fête, ni celle d’un festin ne pouvait dérider, et que la crainte d’être découvert et de perdre la vie ne pouvait rendre plus sombre. Nous avons déjà expliqué la position du cadavre ; sa figure était découverte, ainsi que sa poitrine et ses bras : le reste du corps était enveloppé dans un linceul blanc et fin, de sorte que si le sang coulait d’une des parties couvertes, on ne pouvait manquer de s’en apercevoir à l’instant.