Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/422

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sauvage plaisir que trouvaient les païens à contempler les combats de gladiateurs.

La foule était si grande que toute autre personne eût désespéré de la traverser ; mais la déférence générale qu’on avait pour Henri du Wynd, comme champion de Perth, et la connaissance que tout le monde avait de son habileté à s’ouvrir de force un passage, disposaient tous les spectateurs à lui faire place, de sorte qu’il se trouva aussitôt fort près des guerriers du clan Chattan. Leurs cornemuses marchaient en tête de la colonne ; venait ensuite la bannière bien connue, déployant un chat des montagnes rampant, avec cette inscription : Ne touche le chat qu’avec un gant. Le chef suivait, portant sa claymore à la main, comme pour protéger l’emblème de sa tribu. C’était un homme de moyenne taille, âgé de plus de cinquante ans, mais ne portant ni sur son visage, ni dans son corps, aucune trace d’affaiblissement, ni le moindre symptôme de vieillesse. Ses cheveux, d’un rouge vif et fort frisés, commençaient bien déjà à grisonner ; mais ses pieds et ses mouvements étaient aussi légers à la danse, à la chasse, ou dans un combat, que s’il n’eût pas eu plus de vingt ans. Son œil gris luisait d’un éclat sauvage exprimant un mélange de valeur et de férocité ; mais la sagesse et l’expérience dominaient dans l’expression de son front, de ses sourcils et de ses lèvres. Les champions d’élite suivaient deux à deux. On voyait une teinte d’inquiétude sur plusieurs visages ; car ils avaient le matin remarqué qu’un de leurs camarades manquait à l’appel ; et, dans un combat aussi désespéré que celui qu’on allait livrer, cette perte semblait à tous une chose d’une grande importance, excepté à leur intrépide chef, Mac-Gillie Chattanach.

« Ne parlez pas aux Saxons de son absence, » répliqua le hardi commandant lorsqu’on lui apprit la diminution de sa troupe. « Les mauvaises langues des basses terres pourraient dire qu’un guerrier du clan de Chattan fut lâche, et peut-être même que les autres favorisèrent sa fuite, afin d’avoir un prétexte pour refuser le combat. Je suis sûr que Ferquhard aura reparu dans nos rangs avant le signal de la bataille, ou sinon, ne suis-je pas, moi, un homme qui en vaux deux du clan de Quhele ? Ne combattrions-nous pas quinze contre trente plutôt que de perdre l’honneur que le jour va nous donner ? »

La tribu accueillit par des applaudissements le discours du vaillant chef ; pourtant des yeux inquiets se retournèrent plus