Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/148

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délivrance, et rendue tolérable par tous les soulagements que l’on serait à même de vous procurer, ne serait pas, je pense, un sort encore si dur. — Néanmoins, il faut qu’il m’ait paru assez effrayant, puisque c’est pour m’y soustraire que je me suis confiée à vos bons soins. — Et, quoi que vous puissiez croire ou soupçonner, je vous suis aussi dévouée que jamais femme le fut à une autre : oui, autant sœur Ursule resta fidèle à ses vœux, bien qu’elle n’en ait pas prononcé de définitifs, aussi fidèlement elle gardera votre secret, au risque même de trahir le sien. — Écoutez, Augusta ! » dit-elle en s’arrêtant soudain, « avez-vous entendu ? »

Le son dont elle voulait parler était encore l’imitation du cri du chat-huant, que lady Augusta avait déjà entendue sous les murs du couvent.

« Ce cri, dit Marguerite de Hautlieu, annonce l’approche d’une personne plus capable que moi de nous diriger dans cette affaire. Il faut que j’aille en avant et que je lui parle : notre guide va rester quelques instants avec vous ; et quand il quittera la bride de votre cheval, n’attendez pas d’autre signal : avancez au milieu du bois, et suivez les conseils et les instructions qu’on vous donnera. — Arrêtez ! arrêtez ! sœur Ursule ! s’écria lady de Berkely : ne m’abandonnez pas dans ce moment d’incertitude et de détresse ! — Il le faut dans notre intérêt à toutes deux, répliqua Marguerite de Hautlieu. Je suis aussi dans l’incertitude, je suis aussi dans la détresse ; mais patience et obéissance sont les seules vertus qui puissent nous sauver toutes deux. »

En parlant ainsi, elle frappa son cheval avec sa badine, et, s’éloignant avec vitesse, disparut au milieu d’un épais taillis. Augusta de Berkely voulut suivre sa compagne ; mais le cavalier qui les avait accompagnées retint fortement la bride de son palefroi, d’un air qui annonçait qu’il ne lui permettrait pas d’avancer dans cette direction. Épouvantée sans pouvoir en dire exactement la raison, lady de Berkely resta les yeux fixés sur le bois, s’attendant à voir sortir d’un sentier bien couvert une bande d’archers anglais ou de terribles Écossais, et ne sachant laquelle de ces deux apparitions elle devait le plus redouter. Dans son angoisse, elle essaya encore d’avancer ; mais la rudesse avec laquelle le guide mit de nouveau la main sur la bride de son coursier lui prouva suffisamment que, pour s’opposer à sa volonté, l’étranger emploierait la force physique dont il semblait fort bien muni. Enfin après un intervalle d’environ dix minutes, le cavalier lâcha la bride, et lui mon-