Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/205

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LES EAUX
DE SAINT-RONAN.


CHAPITRE PREMIER.

UNE HÔTESSE DE L’ANCIEN MONDE.


Mais pour activer mon récit, elle brassait de bonne ale et la vendait à merveille.
Skelton.


Parmi les contrées de l’Europe, aucune peut-être, pendant le demi-siècle qui vient de s’écouler, ne s’est accrue aussi rapidement que l’Écosse en richesse et en civilisation : et néanmoins les hiboux du sultan Mahmoud[1] auraient encore trouvé dans la Calédonie, durant tout le cours de cette période brillante, plus d’un village ruiné à choisir pour leur douaire ou leur apanage. Des avantages accidentels ou locaux ont, en plus d’une occasion, déterminé les habitants des anciens hameaux à quitter les situations que leurs prédécesseurs avaient choisies dans l’intérêt de leur sécurité plutôt que de leur convenance ; et ils avaient transféré leur nouveau séjour dans des lieux propres au développement de leur industrie croissante et de leur commerce toujours plus étendu. De là vient que les villes citées avec distinction dans l’histoire d’Écosse, et qui figurent dans l’excellente carte historique de David Macpherson, ne se distinguent plus maintenant des marais sauvages, si ce n’est par la verdure qui embellit le site qu’elles occupaient, ou tout au plus par quelques ruines éparses, semblables à des parcs de brebis, dernières traces d’une existence anéantie pour jamais.

Le petit village de Saint-Ronan, sans être encore tombé dans ce complet oubli, il y a environ vingt années penchait rapidement vers sa ruine. Un site vraiment romantique provoquait le pinceau de chaque touriste[2], et nous tâcherons de le décrire en un langage qui ne pourra guère être moins intelligible que certaines de leurs esquisses. Nous éviterons toutefois, pour des raisons qui nous pa-

  1. Allusion à un conte oriental. a. m.
  2. Passing tourist, dit le texte, mot anglais qui exprime les voyageurs en tournée fréquente, tantôt d’un côté, tantôt de l’autre. a. m.