Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/22

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

me réveiller le lendemain. Le voilà qui vient cependant, » ajouta Anthony en baissant le ton, « et je veux être excommunié s’il n’amène pas avec lui cet animal furieux, son fils Charles, avec deux autres étrangers dont la faim, j’en répondrais, sera assez grande pour avaler tout le souper, s’ils ne nous font pas d’autre mal. — Fi, fi donc, Anthony ! murmura son camarade ; jamais archer meilleur que toi ne porta l’uniforme vert, et cependant tu affectes d’avoir peur de deux voyageurs fatigués, et tu t’alarmes de l’invasion que leur appétit pourra faire sur le repas du soir. Nous sommes quatre ou cinq ici ; nous avons nos arcs et nos flèches[1] à notre portée, et nous ne craignons pas que notre souper nous soit ravi, ou que notre part nous soit disputée par une douzaine d’Écossais établis ou vagabonds… Comment ? » ajouta-t-il en se tournant vers Dickson, « que nous direz-vous donc, quartier-maître ? Vous savez bien que, d’après les ordres précis qui nous ont été donnés, nous devons nous enquérir du genre d’occupations des hôtes que vous pouvez recevoir ; vous êtes aussi prêt pour le souper, je parie, que le souper l’est pour vous, et je vous retarderai seulement vous et mon ami Anthony, qui commence terriblement à s’impatienter, jusqu’à ce que vous ayez répondu aux deux ou trois questions d’usage. — Bend-the-Bow[2], répondit Dickson, tu es un honnête garçon ; et, quoiqu’il soit un peu dur d’avoir à conter l’histoire de ses amis, parce qu’ils viennent par hasard passer une nuit ou deux dans notre maison, cependant je me soumettrai aux circonstances, et je ne ferai pas une opposition inutile. Vous noterez donc sur votre journal que, le quatorzième jour avant le dimanche des Rameaux, Thomas Dickson a amené dans sa maison d’Hazelside, où vous tenez garnison par l’ordre du gouverneur anglais sir John de Walton, deux étrangers auxquels ledit Thomas Dickson a promis des rafraîchissements et un lit jusqu’au lendemain. — Mais que sont-ils ces étrangers ? » demanda Anthony un peu vivement.

« Il ferait beau voir, murmura Thomas Dickson, qu’un honnête homme fût forcé de répondre aux questions de tout méchant vaurien !… » Mais il changea de ton et continua. « Le plus âgé de mes hôtes se nomme Bertram, ancien ménestrel anglais : il a mission particulière de se rendre au château de Douglas, et il communiquera les nouvelles dont il est porteur à sir de Walton lui-même. Je l’ai connu pendant vingt ans, et je n’ai jamais rien entendu dire

  1. Bills, dit le texte ; anciennes armes anglaises, peut-être des espèces de haches. a. m.
  2. Littéralement, Bande-l’arc.