Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/309

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mais l’élève était un enfant gâté, de bonne humeur, de santé faible et de moyens très ordinaires. Son maître ne put à la vérité, lui inspirer aucune portion du vif et noble enthousiasme qui caractérise l’aurore du génie ; mais le jeune lord fit dans chaque branche de ses études autant de progrès que permettait sa capacité. Il comprenait les langues savantes, et retenait assez bien les idées principales des auteurs qu’il lisait. Il cultivait les sciences, et pouvait aussi bien classer des coquillages et des mousses qu’arranger des minéraux. Il dessinait sans goût, mais avec beaucoup d’exactitude ; et quoiqu’il n’atteignît aucune supériorité dans les diverses parties de ses études, néanmoins il possédait assez de littérature et de science pour employer son temps, et défendre contre les tentations une tête qui n’était pas assez forte pour y résister par elle-même.

Miss Augusta Bidmore, seule fille de Sa Seigneurie, reçut aussi les instructions de Cargill dans les différentes sciences que son père désira lui voir acquérir, et que l’instituteur fut capable de lui enseigner. Mais ses progrès différaient autant de ceux de son frère que le feu du ciel ressemble peu à cet élément grossier que le paysan entasse dans son foyer fumant. Ses connaissances en littérature italienne et espagnole, ainsi que dans l’histoire ancienne et moderne, sa supériorité dans le dessin et dans tous les arts d’agrément, étaient de nature à enchanter son instituteur, en même temps qu’elles le tenaient en haleine, de peur qu’à force de progrès heureux et rapides l’écolière ne dépassât le maître.

Hélas ! des relations si intimes, dont les périls proviennent des plus doux et des plus tendres, comme aussi des plus naturels sentiments du cœur, devinrent fatales à la paix du précepteur. Tous les cœurs sensibles excuseront une faiblesse qui, comme nous l’allons voir, portait avec elle son propre et sévère châtiment. À la vérité, Cadenus, le croira qui voudra, nous a assuré que, dans une situation si périlleuse, il conserva lui-même des bornes qui furent malheureusement outre-passées par la pauvre Vanessa, son élève plus passionnée…

Sans éprouver d’autre désir
Il goûtait l’innocent plaisir
De voir à ses leçons une vierge attentive[1]

  1. Swift a raconté en vers ses amours avec miss Vanhorig, sous les noms de Cadenus et Vanessa. Walter Scott, romanciers célèbres.