Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/62

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

teau de Douglas, ce ne sera point avec mon consentement qu’une partie de plaisir, qui évidemment infère un relâchement de discipline, sera faite sans nécessité, surtout quand il faudrait réclamer l’assistance d’un grand nombre d’Écossais, dont les mauvaises dispositions à notre égard ne sont que trop bien connues, et je ne souffrirai pas, quoique mon âge ait pu m’exposer à un pareil soupçon, qu’on m’impute aucune imprudence de cette espèce. Et si malheureusement, bien que j’ignore certainement pourquoi, nous devons à l’avenir rompre ces liens de familiarité amicale qui nous unissaient l’un à l’autre, je ne vois pas le motif qui nous empêcherait de nous comporter dans nos relations nécessaires comme il convient à des chevaliers et à des gentilshommes, et d’interpréter réciproquement nos motifs dans le sens le plus favorable. — Vous pouvez avoir raison, sir Aymer de Valence, répliqua le gouverneur en s’inclinant d’un air roide ; « et puisque vous dites qu’il ne doit plus exister d’amitié entre nous, vous pouvez être certain pourtant que je ne permettrai jamais à un sentiment haineux, dont vous soyez l’objet, d’entrer dans mon cœur. Vous avez été longtemps, et non, je l’espère, sans en retirer quelque fruit, mon élève à l’école de la chevalerie ; vous êtes le plus proche parent du comte de Pembroke, mon cher et constant protecteur ; et si l’on pèse bien toutes ces circonstances, elles forment entre nous une relation qu’il serait bien difficile, pour moi du moins, de rompre à tout jamais… Si vous croyez être, comme vous le donnez à entendre, moins strictement lié par d’anciennes obligations, il faut régler comme il vous plaira nos rapports futurs. — Je puis répondre d’un point, dit de Valence : ma conduite sera naturellement réglée d’après la vôtre ; et comme vous, sir John, je souhaite bien vivement que nous puissions remplir convenablement nos devoirs militaires, sans songer aux relations d’amitié qui existèrent entre nous. »

Les chevaliers terminèrent ainsi une conférence qui avait failli une ou deux fois se terminer par une franche et cordiale explication ; mais il fallait encore que l’un ou l’autre prononçât un de ces mots qui partent du cœur pour rompre, si on peut s’exprimer ainsi, la glace qui se formait si vite entre leurs deux amitiés : et ni l’un ni l’autre ne voulut être le premier à faire les avances nécessaires, quoique chacun d’eux l’eût fait volontiers s’il eût pressenti que l’autre s’avancerait de son côté avec la même ardeur ; mais leur orgueil fut trop grand et les empêcha de dire des choses qui auraient pu