Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/149

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papes envoyées par cette femme schismatique du nord, la duchesse de Gordon. — Soit, soit, — cependant il faut prendre quelqu’un. Que pensez-vous de Kittlepunt ? — C’est un arménien[1]. — Woodsetter ? — Il est, je crois, coccéien[2].— Le vieux Whiliewhaw ? — Il est tout ce que l’on veut. — Le jeune Nœmmo ? — Il n’est rien du tout — Vous êtes difficile à satisfaire, voisin, dit Saddletree ; je vous ai indiqué tout ce qu’il y avait de mieux. Il faudra que vous cherchiez vous-même ; mais songez que dans le nombre des conseillers est le salut… Mais que dites-vous du jeune Mackenye ?… Il suit sur le bout du doigt les pratiques de son oncle. De qui me parlez-vous là ? » s’écria l’ardent presbytérien transporté de colère : « d’un homme qui a les mains teintes du sang des saints ? Son oncle n’est-il pas mort avec le surnom du sanguinaire Mackenye ? ne portera-t-il pas ce nom aussi long-temps qu’une langue écossaise pourra prononcer une parole ? Si pour sauver la vie de cette chère enfant que le malheur a frappé, celle de Jeanie et la mienne même, et celle de tous les hommes, il me fallait demander à cette enfant de Satan de dire une parole pour moi ou pour eux, ils périraient tous avec Davie Deans. »

Ce fut le ton exalté avec lequel il prononça cette dernière phrase qui interrompit l’entretien de Butler et de Jeanie et les fit rentrer dans la chambre. Ils trouvèrent le pauvre Deans dans une espèce de frénésie, causée en partie par son affliction, et en partie par sa sainte colère contre les propositions de Saddletree ; ses joues enflammées, sa main fermée, sa voix élevée, les larmes qui roulaient dans ses yeux, et ses paroles interrompues, montraient qu’il ne pouvait exprimer l’accablement qu’il éprouvait. Butler, craignant les suites d’une pareille agitation pour un vieillard faible, se hasarda à lui dire quelques mots pour l’engager à la patience. « Je suis patient, » répondit Deans avec quelque aigreur, » plus patient qu’un homme ne peut l’être au milieu de l’apostasie de notre temps, et je n’ai pas besoin que des hérétiques, ni des fils ou des petits-fils d’hérétiques, apprennent à mes cheveux gris à porter ma croix. — Mais, » continua Butler sans s’offenser de ce trait dirigé contre la foi de son grand-père, « nous devons user des moyens humains. Quand vous appelez un médecin, vous ne vous informez pas, je pense, de ses principes religieux ? — Pourquoi pas ? répondit Deans. Je le ferais certainement ; et s’il ne me

  1. Sectateur d’Arminius, théologien hollandais. a. m.
  2. Sectateur de Coccéius, théologien de Brême. a. m.