Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/325

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dis qu’on ne vous fera pas de mal ; mais si vous ne voulez pas quitter la route de bonne grâce et nous suivre, le diable m’emporte si je ne vous fais pas sauter la cervelle là où vous êtes ! — Tu es un rude ours, Tom, dit son compagnon, et si tu la touches, je te secouerai par le collet de manière à t’émouvoir les entrailles. Soyez tranquille, jeune fille, je ne souffrirai pas qu’il vous touche du bout du doigt si vous venez tranquillement avec nous ; mais si vous restez là à discuter sur la route, je vous laisse vous débattre ensemble. »

Cette menace offrait tout ce qu’il y a de plus terrible à l’imagination de la pauvre Jeanie, qui voyait dans celui qui paraissait moins cruel la seule protection qui lui restât contre le traitement le plus brutal. C’est pourquoi non seulement elle le suivit, mais même elle le tint par la manche dans la crainte qu’il ne lui échappât, et cet homme, tout endurci qu’il était, parut touché de cette marque de confiance, et lui répéta à plusieurs reprises qu’il ne souffrirait pas qu’on lui fît du mal.

Ils conduisirent leur prisonnière dans une direction qui s’écartait de plus en plus de la grande route ; mais elle remarqua qu’ils suivaient une espèce de sentier ou chemin de traverse, ce qui la soulagea d’une partie de ses inquiétudes, qui auraient encore été plus grandes si elle ne les avait pas vus suivre de route fréquentée.

Après avoir marché environ une demi-heure, tous trois gardant un profond silence, ils approchèrent d’une vieille grange qui était sur le bord d’une pièce de terrain cultivé, mais éloignée de toute espèce d’habitation. Cependant cette grange était elle-même habitée, car on voyait de la lumière aux croisées.

Un des voleurs gratta à la porte, qui lui fut ouverte par une femme, et ils entrèrent avec leur malheureuse prisonnière. Une vieille femme, qui était occupée à préparer le souper sur un feu de charbon de terre étouffant, leur demanda au nom du diable pourquoi ils amenaient ici cette fille, et pourquoi ils ne l’avaient pas dépouillée et laissée ainsi sur la route.

« Allons, allons, la mère Sangsue, dit le plus grand, nous ferons ce que nous pourrons pour vous obliger ; nous n’en voulons pas faire davantage. Nous sommes déjà assez mauvais comme cela ; mais pas encore tels que vous voudriez nous voir, des diables incarnés. — Elle a une passe de Jim Ratcliffe, dit le plus petit, et Franck ne veut pas entendre parler de la faire passer à la meule.