Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/448

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Le fermier rentre à son asile ;
La dernière gerbe a foulé
Le sol de la grange d’argile,
Et tout le monde est rassemblé
Pour goûter un repos tranquille.

L’ombre vient quand le soleil fuit ;
La fin du jour sans cesse amène
Celle des travaux qu’en sa peine
L’homme a poussé jusqu’à la nuit.
Lorsque s’est éloigné l’automne,
Et que l’hiver l’a remplacé,
Au plaisir il faut qu’on se donne,
En oubli du souci passé.

Lorsque Madge eut cessé de chanter, Jeanie s’avança vers le lit en l’appelant par son nom ; mais celle-ci sembla avoir perdu tout souvenir. Au contraire, paraissant contrariée d’être dérangée, elle s’écria d’un ton impatient : « Garde ! garde ! tournez-moi du côté du mur, que je n’entende plus prononcer ce nom, et que je n’aie plus rien de commun avec ce monde méchant. »

La garde-malade la plaça dans son lit comme elle le désirait, lui tournant le visage du côté du mur et le dos au jour. Aussitôt qu’elle fut dans cette nouvelle position, elle redevint tranquille et se mit à chanter sur le même ton, bas et modulé comme si elle retombait dans cet état de rêverie que ceux qui venaient d’arriver avaient troublé ; l’air cependant en était différent, et ressemblait un peu à la musique des hymnes des méthodistes, quoique la mesure des vers fut semblable à celle des premiers :

Lorsque la robe d’hyménée,
Robe de grâce, est terminée ;
Lorsque sur l’incrédulité
La foi l’a soudain emporté ;
Lorsque l’espérance riante
De tout délai s’impatiente,
Et que l’ardente charité,
Restreinte aux mondaines limites,
Franchissant les bornes prescrites,
Au palais de la vérité
Aspire dans sa liberté :
Ami, de ta robe de fange
En vrai chrétien dépouille-toi,
Et vole sur l’aile d’un ange
Au séjour brillant de la foi.

Il y avait dans cet air quelque chose de solennel et de pénétrant, dont l’effet était augmenté par le son harmonieux et pathétique d’une voix qui avait été dans l’origine belle et étendue, et qui en perdant de sa force avait acquis une douceur attendrissante. Archibald, quoique domestique d’un courtisan, et naturellement